Artemisia : Un duel pour l'immortalité de
Alexandra Lapierre
page 74 [...] - A mon âge, toutes les femmes ont un époux. Il est temps, grand temps : bientôt je serai vieille !
- Et avec quelle dot pourrais-je bien te marier ,
- Les confréries auxquelles vous appartenez y pourvoiront. Ou bien mon parrain. Ou alors un de vos commanditaires, monsieur Olgiati par exemple ...
- En quel honneur l'un de mes mécènes, monsieur Olgiati ou un autre, te doterait-il, toi qui nous déshonores tous ?
- Mais c'est vous qui écartez tous ceux qui pourraient prétendre à ma main !
- Comment ces drôles pourraient-ils y prétendre, si tu ne t'exhibais pas derrière mon dos ? Tu te montres à la fenêtre, j'en suis sûr, tu reçois des hommes ...
- Vous me garderez fille, si je vous laisse faire ! A moins que vous ne me vendiez à l'un de vos compères, à l'un de vos espions ... A ce vieux cochon de Cosimo, par exemple ?
- Encore un mot, et demain tu te tairas à jamais ! Je te mure dans un couvent !
- Essaie un peu, mon père, essaie donc si tu l'oses ! Qui te découpera tes toiles quand tu m'auras faite religieuse, qui les tendra sur tes châssis, qui te cuira tes huiles ? Crois-tu que Francesco saura jamais préparer les enduits comme je les fais, moi ? Et Giulio te poser l'imprimitura avec ce dosage si juste de colle et de plâtre ? Ces deux imbéciles, là, qui te broient tes couleurs, penses-tu qu'ils pourront achever les tableaux que tu ne termines pas ? Et les copies des œuvres dont tu gardes la réplique pour les vendre plus tard, si ce n'est pas moi qui les peins, qui le fera ?
Le visage enflammé par la chaleur des tisons sur lesquels elle s'était penchée en surveillant l'huile que Francesco n'avait pas réussi à purifier, elle le défiait. [...]
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