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Critique de dannso


« le doute est un état mental désagréable, mais la certitude est ridicule. » Voltaire
C'est sur cette citation ô combien appropriée que se conclut ce livre étrange, le second de l'auteur.
Et c'est en écoutant « L'estasi dell'oro », musique très connue du film « le bon, la brute et le truand » que j'écris cette critique. En effet cette musique revient régulièrement hanter le héros de ce livre : Toussaint.
Toussaint n'est pas un enfant ordinaire, c'est le moins qu'on puisse en dire. Né un premier novembre, dont il porte le prénom, dans une famille où le père s'efface devant la mère toute puissante dans sa cruauté, il est solitaire et quelque peu méprisé voir persécuté par les autres enfants du village. On connait la promptitude des enfants à railler ce qui est différent.
Pour vous donner un exemple de ce qu'a pu être son enfance, le jour de son anniversaire se passe à faire la tournée des cimetières l'écartant à jamais des fêtes du même nom :
« Quoi qu'il en fût des raisons de son prénom, le garçon voyait en celui-ci la première maltraitance de sa mère à son égard, autant qu'un rappel permanent de cette injustice originelle qui avait teinté toute sa jeunesse. Car au premier novembre de chaque année, dès le matin, tous trois partaient en vadrouille pour la tournée des cimetières, visitant d'obscures connaissances que, pour la plupart, Toussaint n'avait jamais connues qu'à l'état de dépouilles. »
Mais ce qui est extraordinaire chez Toussaint, plus que sa condition d'enfant mal aimé, c'est qu'il est mort, plusieurs fois d'ailleurs :
« Ce fut par noyade qu'il mourut la première fois. » C'est par cette phrase que débute ce roman :
Toussaint s'enfonce dans l'eau boueuse d'un étang, alors que les notes de L'estasi dell'oro retentissent dans sa tête, personne n'est assez proche pour le sauver … et il se réveille dans la baignoire chez lui. Et personne ne lui parlera jamais de ce qui s'est passé. Il en déduira qu'il est mort et revenu en vie ou pas vraiment, dans un état différent qui le met définitivement à part, et « sa crevure » de mère contribuera par ses bons soins à quelques autres de ses morts.

Toussaint va croiser le buisson ardent : c'est la chevelure de Louison, autre enfant étrange, rouquine, dont la mère a disparu dans un accident d'avion, et qui depuis est soumise à d'étranges pulsions, qui se satisfont dans la transgression. Ces deux-là vont se trouver, développer une relation dont le lieu de rencontre préféré sera le cimetière, lieu autrefois honni par Toussaint qui y passait à regret ses anniversaires.
L'auteur nous entraine dans leur histoire commune, mélange de tragique et de burlesque, de philosophie et de découvertes plus physiques. Ils s'épaulent se soutiennent, même si chacun ne comprend pas vraiment l'autre. Ils se chamaillent et grandissent comme ils peuvent bien seuls, malgré la présence d'un curé revenu de tout, même de la foi. Les mères ne sont plus, les pères sont dépassés et le reste du monde singulièrement absent du roman : la vie n'est supportable que lorsqu'ils sont tous les deux.
Deux personnages étranges, façonnés par une enfance aux évènements tragiques, qui vont chacun élaborer un système de défense pour tenir debout : ce sera la transgression pour Louison, les élucubrations métaphysiques pour Toussaint.
Je ne rentrerai pas dans le détail de celles-ci, il faut les découvrir sous la plume efficace et incisive de l'auteur. J'ai beaucoup aimé son écriture : Il joue avec les mots, alterne les envolées presque lyriques avec des phrases très courtes, sans sujet, qui ne laissent pas au lecteur la possibilité de reprendre son souffle. C'est un plaisir renouvelé à chaque instant, j'aurais pu noter une citation à chaque page. Et le tout saupoudré d'un humour parfois très noir. Qui culmine dans une scène de fin jubilatoire.

Un roman très original, assez différent du premier par le sujet et le traitement, même si deux des personnages de celui-ci y font une courte apparition; le point commun est l'ancrage dans cette campagne où il est difficile d'être différent, thème présent dans les deux romans.
Je remercie l'auteur pour sa confiance. Après la lecture de ses deux romans, très différents, mais autant maitrisés l'un que l'autre, j'attends avec impatience de découvrir quels seront le sujet et le ton du troisième.
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