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Critique de afriqueah


C'est la guerre en Europe, le père est loin dans une ville du Nigeria, dont la poésie tinte aux oreilles d'un jeune garçon : Onitsha. Il est attaché à sa mère comme les enfants monoparentaux le sont, il la regarde nue se douchant un jour, et sera, c'est attendu, jaloux de son père.
Ce n'est pas mon père, se dit Lintan , quand il débarque sur le fleuve Niger, et qu'il perçoit aussi le désappointement de sa mère Maou, qui avait rêvé de l'Afrique, « les randonnées à cheval dans la brousse, les cris rauques des fauves le soir, les forêts profondes pleines de fleurs chatoyantes et vénéneuses, les sentiers qui conduisaient au mystère. Elle n'avait pas pensé que ce serait comme ceci, les journées longues et monotones, l'attente sous la varangue, et cette ville aux toits bouillants de chaleur. »

Récit du voyage que Le Clézio a fait avec sa mère, de Nice à Port Harcourt, et dans les mêmes conditions.

Sauf que ce qui semble mal commencer devient une tendre histoire. Lintan l'enfant part pied nus en brousse, court avec les autres enfants, rencontre et regarde, observe et découvre, il se régale de la vie sauvage, pense être né là, dans la proximité du fleuve, vit tout ce qui peut enchanter les enfants en Afrique et parallèlement invente un roman( comme Le Clezio l'a fait avant lui).

Le père, plutôt absent, invente aussi une histoire, celle de la reine noire de Meroe, la capitale de Nubie, qui aurait migré depuis le Nil jusqu'au fleuve Niger. Pour ce faire, Le Clézio adopte une mise en page différente, mi page, comme dans son autre roman « Désert ».
C'est bien de fleuves dont il s'agit, le Niger omniprésent, c'est lui qui apporte les nouvelles, lui par qui les nouveaux arrivent, lui qui illumine tout le roman. Car c'est un roman lumineux, un peu comme Maou, inactive et sereine, sachant cependant s'opposer aux agissements d'un colon anglais, prétentieux et cruel, voulant faire construire une piscine par des prisonniers enchainés.

Elle découvre la lenteur « un mouvement très long et régulier, pareil à l'eau du fleuve qui coulait vers la mer, pareil aux nuages, à la touffeur de l'après midi, quand la lumière emplissait la maison et que les toits de tôle étaient comme la paroi d'un four. La vie s'arrêtait, le temps s'alourdissait. »

L'eau est toujours présente dans ce roman, celle du bain de la mère, du voyage qu'ils font ensemble de Bordeaux à Dakar puis de Dakar par la mer jusqu'à Cotonou et enfin Port Harcourt, enfin les deux fleuves, le Nil et le Niger, la jeune femme au profil égyptien, Oya, « l'eau », qui perd les eaux devant Fintan.

L'eau, plus que la guerre, évoquée au début du livre, raison de l'éloignement du père, et guerre du Biafra des années après, pour le pétrole sous marin. « Pour la main mise sur quelques puits de pétrole, les portes du monde se sont fermées sur eux (les enfants sacrifiés) les portes des fleuves, les iles de la mer, les rivages. Il ne reste que la forêt vide et silencieuse. »
Je lis ce roman comme un histoire d'eaux, et de femmes : Maou, Oya, Marima, et l'héroïne du père, la reine de Meroe et sa descendance de femme en femme , jusqu'à Arsinoe.
Ceci est ma lecture, très partiale ( l'eau, les femmes, la sérénité africaine), cependant Le Clezio a écrit, avec Onitsha, aussi, un livre très documenté, qu'il met comme en parenthèse par sa manière de scinder les pages en deux, et qui demande une érudition que je n'ai pas.
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