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Critique de Frederic524


Un livre qui fait douloureusement écho à l'actualité avec le conflit russo-ukrainien. En effet, comment ne pas songer au mépris de la vie humaine, aux offensives vaines, aux échecs qui se multipliant fragilisent le dictateur. La radicalisation du régime nazi, suite à l'attentat du 20 juillet 1944, avec cette dérive de plus en plus mortifère, la psychose autodestructrice et totalement paranoïaque d'un Hitler sous l'emprise de psychotropes puissants, de cocaïne et autres substances, qui va sacrifier son armée, son peuple. La moitié des soldats allemands morts, durant la Seconde guerre mondiale, le seront lors des neuf derniers mois du conflit. Perdue depuis la cinglante défaite à Stalingrad de la VIème armée de von Paulus entre fin 1942 et début 1943, la réponse du régime hitlérien est celle d'un Goebbels appelant à « la guerre totale » en février 1943, face à une salle pleine de nazis convaincu que le sort de la guerre peut encore évoluer dans le sens de l'Allemagne. A l'Est, les troupes allemandes subissent défaite sur défaite face au rouleau compresseur russe. L'offensive de la dernière chance au niveau du saillant de Koursk à l'été 1943, une opération totalement folle où l'adversaire soviétique connaissait les plans allemands et avait donc préparé ses différentes lignes de défense. Plus nombreux, mieux armés, bénéficiant de la puissance sans limite de leur artillerie et de leur aviation, les russes écrasent la Wehrmacht qui ne fera plus que subir, en mettant en place une défense élastique. En février 1944, c'est le chaudron de Tcherkassy, un autre Stalingrad avant l'assaut final déclenché à l'été 1944, l'opération Bagration qui consume les derniers carrés de soldats allemands. C'est à l'Est que l'Allemagne perdit la guerre. Néanmoins, nos mémoires ont retenu l'importance du débarquement alliées le 6 juin 1944 et de la bataille d'attrition qui en suivit dans le bocage normand durant douze semaines. « Combattre en dictature » n'est pas un énième livre sur la bataille de Normandie. le but ici est de comprendre ce qui conditionna les soldats allemands à lutter de façon féroce face aux alliées. La bataille était perdu d'avance. 2 millions d'hommes côté allié, 640 000 hommes côté allemand, un avantage allié en matériel militaire absolument saisissant (blindés, artillerie, aviation, navires de guerre..). Jean Luc Leleu, historien au CNRS (Maison de la recherche en sciences humaines/université de Caen-Normandie) s'applique à déconstruire les légendes autour de cette bataille, le tout du côté allemand. Après la guerre, beaucoup d'officiers, de généraux ont falsifiés la réalité de la bataille en occultant leurs erreurs tactiques, leur peur d'Hitler et de ces moyens de coercition. La Wehrmacht a commis autant de crimes que la Waffen SS. du simple soldat aux officiers, généraux, c'est tout l'organigramme nazi qui mena, en toute conscience des crimes de guerre. Une armée allemande aux unités disparates, cosmopolites, mal équipée, mal soignée, mal dirigée. Aucun soutien aérien, des renforts au compte goûte, un manque de munition et d'essence pour les blindés. Alors Jean-Luc Leleu pose la question de savoir pourquoi, malgré tous ses éléments relevés, l'armée allemande a tenté de résister durant douze semaines. le moral, le sens du sacrifice (mythe ou réalité ?), l'impact de la propagande, le serment de fidélité à Hitler, l'obéissance forcenée cachant une réalité beaucoup plus complexe avec des unités entières se rendant, des généraux désobéissant discrètement aux ordres de tenir « jusqu'à la dernière cartouche » selon les mots du dictateur. Pour sauver ce qui pouvait encore l'être. le rôle de la propagande, la croyance du simple soldat aux armes « magiques » comme les V1, V2, les avions à réaction, les nouveaux sous marins et blindés, qui pensaient-ils inverseraient le cours de la guerre. Des chimères, des mensonges d'un dictateur totalement coupé de la réalité, entouré d'une cours vaniteuse ne songeant qu'à être le premier « paladin » d'Hitler. « Combattre en dictature » analyse et décortique avec précision, acuité et une connaissance sans faille des archives allemandes, des interrogatoires des prisonniers allemands par les alliés. Tout ces éléments amènent à renverser les paradigmes, à revoir notre façon de penser la guerre au niveau du soldat. Loin des troupes fanatisés présentés par les actualités de la propagande de Goebbels, on retrouve énormément de combattants subissant jour après jour un conflit meurtrier, sans espoir de victoire, abandonné des hautes sphères du régime nazi. Une poignée de fanatiques nazis, souvent de très jeunes éléments entre 17 et 20 ans qui n'ont connu et vécu que sous le joug d'Hitler, se sacrifièrent, principalement dans des unités Waffen SS. Mais là encore, l'image d'Épinal du courage et du sacrifice au combat des unités blindées SS ou des unités d'élites parachutistes, des hommes ayant connu l'expérience du front de l'Est, n'est pas aussi massif et systématique que l'on a pu le penser. Les troubles psychiques, les maladies, l'hygiène, le manque de nourriture, l'absence de relève des troupes en première ligne, tous ces éléments se rajoutent à une défaite rendu inéluctable. le lavage de cerveau, l'absurdité des consignes, la violence et la barbarie d'éléments de la Wehrmacht, de la SS à l'encontre des populations civiles, des résistants fusillés et torturés. On apprend aussi que les officiers allemands avaient pour ordre d'abattre les soldats abandonnant leurs positions. Une somme de plus de 780 pages sortie chez Perrin en août 2022. Si vous aimez l'histoire, tout particulièrement la Seconde guerre mondiale et la bataille de Normandie, ce livre de Jean-Luc Leleu vous permettra d'aborder sous un prisme différent, le vécu dans la bataille du soldat allemand. La démarche est novatrice et nécessite pour apprécier encore davantage et comprendre les nombreux éléments abordés, une connaissance plutôt consistante de la période.
Lien : https://thedude524.com/2022/..
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