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Critique de umezzu


A force d'attendre de lire ce Lemaitre, les critiques élogieuses se sont multipliées sur Babelio et ailleurs. Rien de surprenant, Lemaitre a un vrai talent d'écriture pour créer des destins parallèles au monde réel. Dans la suite chronologique de sa trilogie Les enfants du désastre, il s'attaque maintenant à l'après seconde guerre mondiale et aux fameuses Trente glorieuses.
Pour autant, les premières pages de ce roman qui installent la famille Pelletier, entre la savonnerie familiale implantée à Beyrouth et les portraits croisés des trois frères et de leur soeur, ont avancé bien doucement.

Le départ des enfants du Liban est un crève coeur pour leurs parents : passe pour François, brillant élève destiné entrer dans les meilleures écoles parisiennes; tant pis pour l'aîné Jean, manifestement incapable de reprendre l'affaire familiale, et mené par Geneviève, sa femme au caractère acariâtre; désolant pour Étienne, homosexuel parti au Viêt-Nam sur les traces de son amour interdit.
C'est ce troisième récit qui constitue l'ossature du livre : le Viêt-Nam de la colonisation, des affaires et des affairistes, pendant que le Viet Minh rôde, mène une guérilla et essaie de s'implanter. Tranquilles certitudes de colons blancs; foule vietnamienne cherchant protection auprès du plus fort, voire d'une secte locale.
En parallèle, François contrairement aux espoirs de son père s'obstine à essayer de percer dans le journalisme. Être témoin, avec Jean, du meurtre d'une star de l'écran commis dans les toilettes d'un cinéma parisien, va lui permettre de se faire remarquer dans les pages faits-divers de son quotidien.
Quant à Jean il échoue aussi lamentablement dans sa vie de représentant de commerce que dans les affaires familiales.

L'intrigue tarde un peu à atteindre son rythme de croisière. Puis les démêlés de Étienne avec les autorités civiles et militaires et ses découvertes du fonctionnement de l'économie vietnamienne au travers de l'Agence des monnaies deviennent le fil rouge qui happe le lecteur. Les histoires s'entrecroisent avec talent, toujours portées par une reconstitution de la période très documentée, et que l'on sent très juste.

Le lecteur ressent toute la moiteur d'un Viet Nam colonial que tous savent aller vers une indépendance inévitable. le fonctionnement d'un quotidien aux grandes années du journalisme fait inévitablement penser au France Soir de Pierre Lazareff, déjà largement évoqué dans la littérature française. le reste implante ce que lecteur devine être le début de nouveaux soubresauts à venir pour les autres membres de la famille Pelletier.

Le trait est parfois épais, mais c'est ce qui amène une forme d'humour, un second degré qui romance ces destinées familiales. L'art du conteur est au maximum et l'auteur de roman policier se permet même dans la partie finale un rebondissement que je n'avais pas vu venir.

D'un début un peu laborieux, on passe à un récit puissant, évocateur, qui inévitablement va plus que dépasser ces six cent premières pages.
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