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Critique de soniaboulimiquedeslivres


Un roman à la fois dur et touchant en plein coeur de la Belle Époque.

Bienvenue à Clermont-Ferrand en 1880. Claire Musard, 17 ans, quitte la maison familiale et la campagne auvergnate où elle a grandi pour devenir domestique chez la famille Gervais, en plein centre de Clermont-Ferrand. Il faut savoir qu'à l'époque, la domesticité est la première branche d'emplois féminins. Cette nouvelle vie lui plait, malgré le travail intense, jusqu'au jour où Claire est violée par le fils Gervais. Pour rajouter au traumatisme, elle se rend compte quelques semaines plus tard qu'elle est enceinte….Et la descente aux enfers commence…

Renvoyée par les Gervais, rejetée par sa famille, la pauvre Claire se retrouve dans la rue. Sans argent, sans nourriture, sans toit. Victime d'une fausse couche, elle est abordée par Monsieur Grangier, qu'elle voit au départ comme son sauveur. Sauf qu'il est un placeur et que le travail qu'il lui propose est bien loin de ce qu'elle pensait….
Claire se retrouve à « La Boule d'Or », l'une des maisons closes de Clermont. Claire devient « Jolie Fleur », et doit obéir à Madame Andrée, sa maquerelle. Une nouvelle vie commence pour Claire….

J'ai beaucoup apprécié « La maison des âmes perdues », à la fois grâce aux descriptions de la vie de l'époque, mais aussi grâce à ses personnages. Alain met en avant les inégalités économiques et sociales, très marquées entre le milieu urbain bourgeois et les campagnes, à la population bien plus modeste. Claire va découvrir la ville et ses fastes lorsqu'elle sera au service des Gervais. On assiste avec elle à la restauration de la cathédrale, ou encore à la première célébration du 14 juillet en tant que fête nationale. Passionnant ! Plus tard dans le récit, c'est tout le fonctionnement des maisons closes qui nous est détaillé. La Boule d'Or a bien existé, comme le précise Alain.

Les maisons de tolérance sont très réglementées, les filles sont déclarées en préfecture et figurent dans un fichier national de la prostitution. Elles ne sortent que pour se rendre à une visite médicale mensuelle. Toutes espèrent pouvoir racheter leur dette à leur maquerelle et rêvent d'un ailleurs. Douce utopie…

Claire va découvrir au sein de la Boule d'Or l'amitié, les rivalités, la complicité ; Belle Gorge, L'Espagnole, Cocotte, Louison, Toinon, elles sont toutes dans la même galère. La pauvre Claire, qui ne connait rien d'autre des affaires de l'amour qu'un viol, va se retrouver à devoir donner du plaisir à des hommes avides. La scène où Belle Gorge lui explique les choses de l'amour m'a fait sourire.

« Ici nous vivons dans un tout petit monde. Tu apprendras à connaître les habitudes des autres et tu comprendras vite ce que tu peux faire ou non. Pas de vie intime ici, tout le monde sait tout, on ne peut rien cacher. »

La plume d'Alain est fluide, riche. La narration, linéaire, impose un rythme agréable. Les rebondissements posés judicieusement relancent le récit, provoquant une certaine addiction. le lecteur est concentré sur le destin de Claire, avide de savoir ce qu'il va lui arriver.

Les descriptions des lieux et des personnages permettent une belle immersion, j'ai pris beaucoup de plaisir à me plonger dans cette période historique et dans le destin de Claire et de ces femmes. J'ai été très touchée par ces filles de joie, considérées comme citoyennes de second rang, indésirables, contraintes de vendre leurs charmes afin de ne pas finir dans la rue, vivant avec la menace constante du spectre de la contagion vénérienne. de classe modeste, jeunes, en rupture familiales, ces femmes ne sont que les victimes d'une société patriarcale. Je n'ai pas pu m'empêcher de penser que la fermeture de ces maisons closes a déplacé le problème et mis les filles de joie dans des situations bien plus dangereuses et difficiles.

« La maison des âmes perdues » est un roman marquant et émouvant, porté par le personnage de Claire qui fera tout pour se soustraire à sa condition. Je vous le conseille !

Je remercie Alain et les Éditions De Borée pour cette lecture.

« Ce n'est pourtant pas le travail qui manque à Clermont-Ferrand, et je connais une dame tout à fait comme il faut qui m'honore d'être mon amie. Elle vient en aide aux jeunes filles dans votre situation.
Claire regardait son visiteur avec des yeux ronds. Se pourrait-il que la chance lui sourie ? »

#Lamaisondesâmesperdues #AlainLéonard #EditionsdeBorée
Lien : https://soniaboulimiquedesli..
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