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Critique de Valerielle


Dans ce roman graphique dense, la journaliste Inès Léraud rend compte de ces trois ans passés au coeur de la Bretagne. Elle documente avec professionnalisme des faits qui remontent à 1971 lorsque la première marée verte est observée sur des côtes bretonnes. Composé de plusieurs grandes parties, son ouvrage rassemble des interviews, des propos d'hommes politiques, d'industriels agroalimentaires, des agriculteurs, des hommes de lois, des préfets, des politiques, des citoyens, des chasseurs, des proches de disparus... Des extraits de documents officiels, des articles de presse jalonnent l'investigation.
L'histoire est savamment construite, à la façon d'une enquête, elle nous entraîne dans le travail de fourmi d'Inès Léraud. Courageusement, elle avance au milieu des mensonges et des petits arrangements entre amis d'hommes de pouvoir qui ont tout intérêt à ce qu'on ne sache pas la vérité : les algues vertes tuent, sont un danger pour l'environnement et ont pour origine l'agriculture intensive. L'ambiance est particulièrement pestilentielle : des émanations toxiques d'H2S aux non-dits, au refus d'autopsie des corps d'animaux ou d'humains morts sur des plages bretonnes, des échantillons qui disparaissent dans les laboratoires, des questions de médecins restées sans réponse, des pressions,, nous voici en présence de nombre d'éléments constitutifs d'un bon polar mais c'est malheureusement une vérité qui dérange.
Le propos pourrait être ennuyeux et pédant. Pas du tout. C'est une histoire qui se déroule et se lit sans difficulté. Les dessins aux traits précis rendent compte des nombreuses rencontres sur le terrain. On ressort plus savants de cette lecture et on se souvient de nos cours d'histoire : le plan Marshall pour la reconstruction de la France après 1945, l'introduction par les Américains de nitrates et de phosphates, le remembrement agricole pour avoir des terrains plus grands, sans haies gênant les engins agricoles, mais qui vont favoriser encore plus l'écoulement des eaux polluées vers la mer...
On ressort furieux et révolté de cette lecture : la "stratégie de l'incertitude" de la filière agroalimentaire (ne serait-ce pas plutôt les rejets de lessives par les particuliers qui sont à l'origine de la pollution des sols bretons ? ), l'inaction environnementale de l'État, les mensonges des préfets pour préserver les intérêts des lobbys industriels, le mutisme et les pressions pour préserver le tourisme... tout a de quoi dégoûter.
Heureusement, une lueur d'espoir subsiste avec des initiatives citoyennes pour une agriculture respectueuse de l'environnement. Et puis, il y a tous ces gens qui ont témoigné, qui ont parlé malgré les menaces. Tout n'est pas fichu..., certains ont encore du courage.
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