"À qui tu téléphonais, à l'instant, Silien?"
Les yeux noirs de Silien et l'oeil unique du Colt ne quittaient pas le Corse.
"Au cimetière. Pour retenir une place, au cas où tu ne serais pas sage."
"T'as pas de flingue? fit le policier, en le tâtant.
-T'en as déjà connu qui t'ont répondu oui?
"Qu'est-ce qui t'amène? interrogea Maur en examinant son ancien complice.
-Rien, rien... Fit l'autre en souriant. Je venais voir comment t'allais... "
Il avait la voix sourde, un peu empâtée.
"Ça pourrait aller mieux, répondit Maur. J'ai bouffé des escargots hier soir et ça m'est resté sur le buffet! Tu connais pas un remède?
-Lait et cognac, dit Bobo. Un demi-litre de cognac dans un verre de lait. C'est radical..."
"Direction la tirelire, dit Maur.
-Pardon? fit le vieux.
-Montre-nous le coffre, précisa le truand. On te suit.
-Vous allez perdre votre temps... Tout l'argent se trouve à la banque.
-Je sais, dit Maur. Le coffre ça sert qu'à mettre les jouets du gosse. Allez, avance..."
Le vent s'est levé.Une feuille morte aux pointes encore vertes s'est plaquée sur le pare-brise comme une main ouverte...Ponthierry n'est plus loin...La traction dérape sur l'asphalte huileux.Maur redresse rageusement...Une côte...Maur s'exaspère.En haut de la côte un vent furieux galope à sa rencontre,l'assourdit...Un virage...le pied de Maur s'est appesanti sur l'accélérateur, sa jambe s'est pétrifiée.Maur sait que, si un obstacle se présentait,si une voiture débouchait d'une voie latérale, il serait incapable de lâcher la pédale.Vaguement, il imagine le fracas des tôles, le choc du volant percutant son estomac...Et ça le soulage presque...Tout plutôt que cette angoisse interminable,que le remors.