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Critique de Tachan


L'année de Grâce est une dystopie dont j'entends parler depuis sa sortie avec le rapprochement qu'on a fait entre elle et La Servante Écarlate et avec sa belle couverture féminine et végétale très inspirante.

Cependant me voici une fois de plus partagée face à une lecture qui avait tout pour être prometteuse et qui m'a un peu fait l'effet d'un pétard mouillé. Kin Liggett, l'autrice, esquisse un très bel univers mais ne l'exploite pas assez amplement à mon coup et y greffe des romances à faire lever les yeux au ciel une fois de plus. Je crois que c'est vraiment ce qui me frustre le plus dans les lectures jeunesse.

Pourtant l'univers de L'année de Grâce est fort séduisant et bien développé. L'autrice nous y décrit une société patriarcale où le sort réservé aux femmes fait vraiment froid dans le dos. Comme dans la Servante Ecarle à laquelle on la compare souvent, celles-ci sont totalement soumises aux hommes mais dans une ambiance de sorcellerie un peu archaïque et non futuriste. Les femmes vivent toute leur vie sous la coupe des hommes. Une fois qu'elles ont l'âge et leur règle, elles sont envoyés passer un an dans un camp sensé les débarrasser de leur magie mais avant de partir certaine sont choisies par les hommes pour devenir leur épouse, les autres seront envoyés dans des endroits subalternes pour travailler et les soeurs de celles qui échoueront ou s'enfuiront seront envoyés à l'extérieur pour devenir des prostituées. Glaçant !

Tierney est l'une de ses filles mais contrairement aux autres elle ne rêve pas de devenir une épouse, elle rêve de travailler et être libre car elle ne veut pas être soumise à un homme. Depuis toujours, son père, le docteur du coin, lui a appris d'ailleurs à se débrouiller. Mais le grand jour arrive et elle va aller de surprise en surprise.

J'ai beaucoup aimé le ton pesant et délétère de l'histoire. C'était étouffant et cinglant à la fois. J'ai ressenti beaucoup de colère face à cette société où les femmes semblent se laisser faire et se complaire dans les rôles qu'on leur attribue. C'était révoltant pour moi et ce dès le départ mais ça va être pire au fil des pages.

En effet une fois les filles parties pour leur année de Grâce, une deuxième couche va venir s'ajouter, une couche plus mystique diablement intrigante. J'ai adoré découvrir aux côté de Tierney et ses compagnes de quoi il en retournait dans ce camp où on les enferme. On croit volontiers au début qu'effectivement c'est pour débarrasser les femmes de leur magie mais petit à petit on va découvrir tout autre chose, une vaste tromperie et ça va faire mal !

Il y a ainsi un très bon rythme dans l'histoire pendant plus de la moitié du roman. C'est fascinant de suivre ses relations entre Tierney et les autres filles, toutes très différentes d'elle et notamment celle qui s'improvise meneuse et souhaite à tout prix la bâillonner et l'isoler des autres pour rester dans le moule et profiter en quelque sorte de cette année pour régner, ce qu'elle ne pourra pas faire après. C'est fascinant d'assister à leur terrible vie dans le camp où elles sont abandonnées à elle-même. C'est passionnant de voir l'héroïne démêler petit à petit les fils de l'histoire.

Là où tout est gâché, c'est quand l'autrice s'est senti obligée d'introduire de la romance dans son histoire... D'abord, il y a l'ami d'enfance de Kierney qui développe des sentiments pour elle et a tout du petit garçon à côté d'elle. Il a donc l'air ridicule même s'il est très gentil. Puis, il y a **SPOILER** ce braconnier qu'elle rencontre et avec qui elle va, au fil des semaines, nouer quelque chose mais je n'ai pas trouvé cela crédible un seul instant vu le temps qu'elle passe seule ou inconsciente. Cela leur laisse au final très peu de temps ensemble pour que vraiment quelque chose naisse. Surtout l'issue de tout cela m'a semblé bien trop abracadabrantesque et soapesque pour me plaire et avoir l'air crédible ou émouvant à mes yeux. Tout est trop trop creux...

Ainsi quand la fin arrive, que les fils sont démêles, on nous promet comme une petite révolution et je me suis à nouveau retrouvée partagée. D'un côté, j'ai aimé que ce ne soit pas si simple que ça et qu'on assiste plutôt au début d'une révolte silencieuse et pas à un grand chambardement qui aurait manqué de pages pour être développés correctement et qui n'aurait pas été crédible. Mais en même temps, quand je vois tout ça pour ça, je suis frustrée. J'aurais aimé continué à suivre Kierney avec ses nouvelles connaissances dans tous les sens du terme.

L'année de Grâce a donc commencé comme une très bonne lecture, intrigante, passionnante, fascinante et difficile dans ce qu'elle dénonce. Il y a eu un très beau travail sur la perversions et l'utilisation du thème "des femmes sorcières". Mais la romance vient tout gâcher et au final l'autrice n'exploite pas son héroïne comme je l'aurais voulu. Elle accouche d'un mélange un peu fade avec des promesses d'un quelque chose qu'on ne lira pas et qui aurait pu être encore plus fort et émouvant. Dommage.
Lien : https://lesblablasdetachan.w..
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