AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de RGourdon


Imprimé en Mars 2020, ce livre est arrivé chez les libraires au plus mauvais moment de ces dernières années, un obstacle supplémentaire, et même injuste handicap pour un premier roman, pourtant édité au Seuil. "L'ombre de ma mère” mérite une seconde chance, qu'il faut forcer par le bouche à oreille.
La narratrice est une femme exquise, d'une exquisité réellement indiscutable, au moins si l'on en croit l'assurance avec laquelle elle le répète, tout au long de son récit. On comprend vite du reste que c'est le seul atout de son cheminement, voué à la libérer d'un appendice incongru, une ombre, qui l'accompagne dans ses pérégrinations. Non pas la sienne mais celle de sa mère, qui se colle à elle. Cette incongruité va durer, selon le gardien du cimetière, jusqu'à ce que l'ombre règle le mystérieux problème qui la retient sur terre… D'autant plus que notre conteuse comprend, en rencontrant Alberto, qu'elle fait partie comme lui, de la communauté des Inutiles, et qu'un Inutile est tellement transparent aux yeux de la société qu'il n'a pas d'ombre à promener… Malheureusement, Alberto ne peut rien pour elle, qui doit seule se dépêtrer de son encombrante compagne. Elle va, de rencontre en rencontre : un herboriste, une couturière, un marin, mener sa quête jusqu'en Corse, auprès de vieilles tantes disparues qui hantent ses rêves, jusqu'au pied d'un olivier providentiel.
Vouloir résumer “L'ombre de ma mère” à une intrigue a peu de chances d'attirer, car ce petit livre (une maigre centaine de pages) ne joue pas sur ce terrain. Ni conte, ni roman initiatique, il tire tout de même vers ces horizons-là, avec une fraîcheur étonnante. Dit plus simplement, “L'ombre de ma mère” ne ressemble à rien de conventionnel, et c'est ce qui en fait vraiment le charme. Porté par une écriture aussi simple que souple, le fil se livre avec quelque chose de joyeux qui court sous la tonalité plutôt sombre du destin de la narratrice. Je crois aussi (mais je n'ai pas vérifié!) que le livre porte en lui une jolie métaphore de notre époque convaincue de tant d'utilités : la poésie, chargée d'images et de sensations, demeure la seule voie à notre disposition pour résister à l'exigence fonctionnelle. C'est finalement ce qui ne sert à rien, l'ombre dans le cas présent, qui donne le plus à imaginer, et qui ouvre le temps sous nos pas.
Commenter  J’apprécie          50



Ont apprécié cette critique (3)voir plus




{* *}