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Critique de Fleitour


Marceline s'est éteinte ce 19 septembre, mais sa voix a pris son envol.

"Pourquoi une fois revenue au monde, était-je incapable de vivre ?" le récit de Marceline Loridan-Ivens, pose cette lancinante question page 72. Marceline continue, elle évoque "une lumière aveuglante après des mois dans le noir, c'était violent."

Ce livre "Et tu n'es pas revenu," témoigne d'une fracassante trouée dans l'horreur. Combien sont-ils ces revenants de l'enfer, incapable de formuler ce qu'ils ont vécu, car aucun mot, ni aucun récit ne peut traduire cette folie.

La grande force de cet ouvrage, est justement d'avoir écrit l'insupportable, se battre ou mourir, sauver sa peau ou mourir, chiper un quignon de pain ou mourir, dans ces camps, l'enfer c'est les autres. Page 28 elle pose ces mots, " il n'y avait plus d'humanité en moi, j'avais tué la petite fille". " J'étais au service de la mort".

En lisant ses propres aveux, on peut se demander si les récits des survivants avaient malgré eux, occulté des douleurs ultimes, caché les plus dégradantes des saletés commises pour survivre, oublié les lâchetés puériles.

Ici dans ce texte, presque intime, Marceline lâche toutes les vannes de l'horreur, car il faut bien à un moment ou à un autre, tout dire, et peut-être plus, redire qu'elle était devenue une bête affamée, sans avoir la force d'incliner la trajectoire.


Il n'y avait qu'un homme capable de me rendre ma dignité, mon père, pense Marceline, "pour qu'il vive je suis prête à me sacrifier" avouait-elle.

Page 18 elle écrit, " tu as dû me supplier de vivre". Aussi quand Marceline, est éblouie, aveuglée par les phares de la liberté, toute sa vie bascule car » tu n'es pas là », Marceline ajoute alors, " j'ai toujours pensé ta vie contre la mienne".
"Tu aurais dû revenir, ils avaient besoin de toi pas de moi.p 73"

J'ai tenté "d'éloigner Birkenau, je cachais mon numéro" p85, puis basculant dans le vide, Marceline est devenue incassable , avec l'envie de découvrir le monde, se fondre dans des combats censés dissoudre le passé.

Toute la vie Marceline à recherché la lettre que son père lui a adressée à Auschwitz, la suppliant de se battre et de vivre.


À 86 ans elle pense encore à son père, et lui fait cet aveux, " je t'aimais tellement que je suis contente d'avoir été déportée avec toi page 102."

Ce livre est d'une sublime émotion, comme s'il existait des gestations aussi longues pour avouer son amour.
Elle restera toujours vivante, paradoxe de notre humanité,
avec son rire fracassant tous les nuages, et plus encore ceux du passé, et ceux de son adolescence,
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