Qu'on te voie, qu'on te calcule, alors que, toi, tu veux disparaître, devenir invisible, réduire dans l'espace pour que le malheur ait moins prise. Mais ici, tout se voit, même toi. Tout de toi.
C'est plus facile d'aimer un enfant gentil avec des peluches mignonnes qu'un enfant blessé et trop mûr.
Personne n'est là pour leur expliquer que ce n'est pas un délit qui nous a amenés ici, mais le sort. Un délit du sort.
Oui, ça aussi, je connais, faire partie des cas particuliers parmi les cas particuliers, les pires parmi les pires.
Se débrouiller, seul. Grandir en sachant que la vie
m'attend avec un bâton et qu'elle me cognera le
museau dès qu'elle en aura l'occasion. C'est facile
de me toucher, je n'ai pas de refuge, aucune niche
où aller me mettre en boule.
Je suis né sans toit. Je dépends de l'État, de
cette république qui prône la liberté, l'égalité, la
fraternité à certains, mais l'inverse à d'autres.
Moins facile à placer, un enfant pas blanc et bancal.
Je ne suis pas là, pas assez, les médicaments ont bâti d'épaisses cloisons entre le monde et moi. Malgré tout, je suis assez présent pour entendre la saloperie, voir la misère, sentir les mains sur moi, toucher le fond renifler l'odeur de malchance.
La petite histoire de la violence se répète à l'infini.
La palette de couleurs de la misère est riche. Ce qui n'arrange rien.
La mère est un fossé dans lequel on a enterré mon existence.