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Critique de EvlyneLeraut


Fabuleux, un havre où chaque degré est une aube nouvelle.
« Mississippi » « La Geste des Ordinaires » fleuve littéraire fascinant, qui traverse les époques, et dont le halo souverain est résurgence.
Ce kaléidoscope est d'une force rare, d'une beauté inouïe. On retient entre nos mains cette généalogie spéculative. L'acuité des existences et ces êtres qui gravitent dans les pages intenses et puissantes.
Fleuve dont le reflet approuve la trame intrinsèque.
Sophie G. Lucas tisse les fils et nous écoutons le charme des phrases. Ces vies qui ne sont plus anonymes mais que les ombres infinies tourmentent encore inlassablement.
De 1839 à 2006, le flambeau passe de main en main.
« Mississippi » emblème et sceau, endurance et bravoure, tristesse et attachement. L'écriture coopère au rythme du temps.
L'histoire dans la grande, on aime d'emblée ce chant d'une langue aux multiples éclats de réel.
Les personnages comme des héros sidérants d'humanité, de ténacité et de fraternité.
L'évidence des liens, et l'obsession cardinale d'inclure le fleuve sur leurs coeurs.
L'incipit comme un tremblement d'eau glacée, paysan du monde, un homme debout, qu'on aime de toutes nos forces.
À quoi ça ressemble un homme du XIXe siècle ? Comment ça bouge dans son corps ? Comment ça épouse le paysage ?
Impatient, c'est son prénom, majuscule qui tient en main le fil d'Ariane d'un livre beau à couper le souffle. le premier du nom, lui, l'anonyme, herbe fauché. L'attente du regain. « Impatient Lansard, militaire et fils de vignerons ». le mal aimé, le prénom (le vrai), noyé dans le Mississippi. Jusqu'au jour de rédemption. Pas maintenant, pas tout de suite. Des fiançailles en advenir avec le pardon. Retrouver son prénom aux yeux de la loi.
« Es-tu satisfait Impatient. Impatient prend la lumière, la voix de Julien dans le dos. Merci, et s'en va, sort, fuit presque, le fourmillement de la ville de Vesoul encore sous ses pieds, quand les autres, ses compagnons étaient heureux de revenir au village après témoignage, comme quelque chose de perdu là-bas ».
On avance méandre après méandre, subrepticement, siècle de labeur, de sueur, et « un cours d'eau sur la peau de son visage ».
L'osmose d'un tableau frémissant, où les années content les turbulences, les efforts pour vaincre la pauvreté et s'émanciper. La dignité comme la grâce spéculative d'un fleuve-vie.
1868, voici donc les pages à apprendre par coeur. Fleuve-mère qui cherche l'enfant. On observe l'essentiel et le brûlant, le passage de l'initiation pour ce petit garçon. La fusion des évènements, des images, scène au ralenti. Edouard qui s'échappe, l'oisillon qui apprend, « né de la foule ». Relire alors ce chapitre, coopérer avec cette mère, Marie, qui devine l'heure où le fleuve vient d'happer son fils.
Le livre est ainsi. Vibrant, essentiel, Mississippi, le guide, entre champs, chemins et ténacité.
2006 Odessa.
« Après ça, Odessa changea de vie. Après ça, fit cabane et terre quelque part dans les marais ».
Écrire Odessa, contemporaine, altruiste, dévoreuse d'humanisme. La Louisiane gémellaire du Mississippi. La Louisiane est apeurée, fleuve qui charrie la boue et les corps engloutis.
Odessa, parabole vive, « communauté dansante entre le Mississippi et le lac Pontchartrain, Indiens, Noirs, Rois, Reines, Confréries, Tribus, Foule, Gens. Odessa ne reconnaît pas ceux et celles photographiés ».
« Mississippi » on a tous en nous quelque chose, du Mississippi. Les faillites humaines, les folies des hommes, Katrina, l'ouragan qui signe le temps passé, meurtri, et le présent, la lassitude des révoltes, ce qui déborde. le désastre des inégalités. le monde ici présent, est le recueil des vies. Des théologales échappées pour vaincre l'adversité. L'humanité des hôtes des pages carillonne comme un chant entendu et compris, en haute montagne .
« Mississippi », un pur chef-d'oeuvre. La traduction d'un fleuve mappemonde, littéralement grandiose. le triomphe des destinées singulières. À noter une première de couverture explicite et douce, illustrée par Renaud Buénerd, à la fois fleuve et arbre généalogique.
Publié par les majeures Éditions La Contre Allée .
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