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Critique de batlamb


Lors de ses errances dans la campagne galloise du XIXème siècle, un jeune aspirant écrivain s'éveille à son monde intérieur, au contact de ruines romaines juchées sur une colline forestière, sorte de frontière entre notre monde et un au-delà inquiétant, nimbé de flammes crépusculaire, et annonçant un cortège de fantômes. D'abord dévasté par cette vision, le héros en est secouru par un sentiment amoureux. le romantisme noir et ses flammes d'outre-monde sont alors nuancés par une longue rêverie voluptueuse, pleine de symbolisme décadent (Machen écrit ceci en plein milieu des années 1890). le héros fantasme ainsi une ville entière : Avallaunius, probable version romanisée de l'île légendaire d'Avalon. Cela donne matière à un chapitre où l'auteur élabore des descriptions d'un grand raffinement synesthésique : les chants de voix latines et l'odeur de la mer bercent les dégustation de vin dans des coupes serties de pierres précieuses chamarrées, reflétant la richesse des couleurs de la ville, fondues dans une « radiance d'opale ». Lors de cette accalmie, l'auteur dévoile en filigrane sa vision extrêmement esthétisante de la littérature et critique les procès intentés aux auteurs et à leurs postures au XIXème siècle (dont celui, tout récent, d'Oscar Wilde) : « l'humanité doit être jugée par la littérature, et non la littérature par l'humanité. »

Puis vient le moment de gagner Londres pour tenter sa chance dans le monde des lettres. Coupé de ses racines, isolé dans des ruelles obscures et sinistres, le héros émerge brutalement de sa rêverie, pour se rendre compte qu'il n'a pas avancé dans la vie mais au contraire reculé vers une dépravation originelle, qui revient colorer les ruelles les plus sordides de la même flamme inquiétante qu'il avait éveillée dans la colline des rêves, porte du cauchemar. La réalité se perd, vers un dénouement inévitable.

Largement fondé sur la jeunesse d'Arthur Machen, ce roman s'avère inégal, car je le trouve dans l'ensemble plombé par l'éternel défaut qui menace le romantisme : une trop grande complaisance doloriste, ressassée sur de trop nombreuses pages, si bien qu'il est difficile d'échapper à la lassitude. Les aspirations déçues de l'artiste frustré et misanthrope sont décrites de manière constamment emphatique : son coeur comme un « charbon ardent » qu'il voudrait ôter de sa poitrine, les autres êtres humains comme les « silhouettes encapuchonnées du cobra », etc. Bien que dévoyé par cette grandiloquence, le talent poétique de Machen n'en demeure pas moins considérable, et laisse transparaître une description sensible et désabusée de la vie d'artiste dans l'Angleterre fin-de-siècle.
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