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Critique de DAnselme


Ouvrage intéressant, mais dont le niveau d'analyse chute souvent brusquement lorsqu'il se met à commenter l'actualité. Il commence par une distinction tout à fait féconde entre le "monstrueux" et "l'inhumain", puis travaille, à travers une étude de l'oeuvre de Camus, et notamment de "La Peste", à montrer comment nos habitudes perceptives, notre incapacité à demeurer attentif aux petits changements, conduit à l'apparition de cet "inhumain" qui nous surprend car nous avons été aveugles à ses symptômes.

On finit par comprendre où l'auteur veut en venir : la violence qui surprend tant les médias dans notre société (notamment la violence des islamistes, exemple le plus cité dans l'ouvrage) n'est que le résultat de leur incapacité à sortir de leur routine perceptive. On aurait donc pu éviter l'assassinat de Samuel Paty, et il convient de défendre Mila à tout prix. Des passages qui, renvoyant dos à dos l'essentialisation opérée par l'extrême-droite et celle opérée par l'extrême-gauche (coupable de complaisance envers l'islamisme d'après Maeso), sonnent très "Printemps républicain".

Force est toutefois de reconnaître que l'auteur ne rend pas toujours justice à l'argumentaire de ses opposants (pourquoi peut-on accuser Charlie Hebdo d'islamophobie, voire de racisme ? Pourquoi certaines injures, que l'on peut juger raciste dans la bouche d'un Blanc, ne l'est-elle pas dans celle d'un Arabe ?), qu'elle se contente d'évoquer avant de l'évacuer rapidement au nom de la "défense de l'universel" et du rejet de "l'essentialisation". Quand elle ne se prête pas à de véritables jugements à l'emporte-pièce (la démonstration de "l'homophobie" de la Manif pour tous, p. 70-72, frappe par sa platitude). Et que dire du fait que Maeso, après avoir reproché aux médias de monter en épingle des non-événements (p. 59-60), qui seraient sans cela restés de simples détails (on frôle d'ailleurs la contradiction, l'auteur ne cessant de répéter par ailleurs que l'attention aux détails importe) n'hésite pas à lister une foultitude de détails du même acabit (surtout p. 147-154) pour appuyer son analyse.

L'un des passages les plus intéressants de l'oeuvre reste cette étude de la controverse ayant opposé Camus et Sartre (et Jeanson) sur la question de la pertinence du concept d'universalité de la nature humaine pour lutter contre l'oppression (bon nombre de controverses actuelles pouvant être analysées à travers l'opposition de ces deux auteurs). Mais là encore, les arguments de Sartre sont à peine évoqués qu'ils sont déja refutés par l'idée que la révolte "est un lieu commun" et "l'affaire de tous les humains" (p. 146), sans que soit suffisamment montré ce qui, dans l'argumentaire de Sartre, permet justement de contester ce point.

Bref, un ouvrage qui a le mérite de relire Camus à travers un prisme relativement peu évoqué chez lui (la question de l'habitude, de l'attention, et de l'abstraction), en en montrant les conséquences dans l'analyse de l'actualité. Pour le reste, le livre ne prêchera que des convaincus.
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