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Critique de mumuboc


L'Alaska, l'immensité, le froid, la neige, la nature omniprésente et des êtres humains qui se fondent dans le décor, retrouvant parfois des instincts primaires, voir bestiaux comme pour Tracy, cette jeune fille de 17 ans qui vit avec son père Bill, musher, son jeune frère Scott et leurs chiens et qui possède des facultés peu ordinaires.

"J'ai senti quelque chose de sauvage monter en moi. Un puissant désir de courir aussi loin que je pouvais, jusqu'à ce que ma tête se vide intégralement et que ma peau s'arrête de bourdonner et que je sois capable de me concentrer suffisamment longtemps pour poser un collet et attendre qu'une petite bête se pointe, et alors là je pourrais m'abandonner complètement quelques instants, mes yeux et mes oreilles cesseraient de m'appartenir, ce seraient ceux d'une marte ou bien d'un écureuil.(p45)"

Tracy est mi-humaine mi-animale, à la fois sauvage, rebelle mais aussi sensible et instinctive. Oui c'est cela, instinctive, elle vit comme elle ressent et comment ressentir mieux qu'en buvant le liquide de vie afin de s'imprégner des pensées des autres, proies ou proches. Seule sa mère, Hannah, récemment décédée, connaissait ses besoins et arrivait à la canaliser en lui imposant quatre règles fondamentales qu'elle ne devait jamais outrepasser peut-être parce qu'elle-même avait connu les mêmes besoins.

Tracy Sue Petrikoff se raconte, jonglant avec les personnalités dont elle s'imprègne, allant jusqu'à les endosser pour mieux comprendre, apprendre, prévoir et anticiper. Comme un animal elle se fit à son instinct et va se rapprocher de Jesse, un jeune de son âge, après une période d'observation. Mais comme rien n'est ce qu'il paraît être dans ce roman, Jesse va se révéler différent. Lui aussi a ses secrets, son passé, ses souffrances. Elle va le flairer, se rapprocher, accepter la caresse de cette main tendue.

Mais ce dont a le plus besoin Tracy depuis son plus jeune âge outre ses courses en traîneau avec ses chiens dans la forêt, la pause de pièges où elle est passée maître et sa soif de chaleur qu'elle prélève sur ses proies mais aussi sur ceux qui l'entourent, c'est des réponses aux nombreuses questions qui la hantent.

C'est un roman d'aventure, de nature, d'apprentissage, frôlant avec le fantastique mais sans jamais aller au-delà du possible, l'auteure prenant le partie d'endosser le rôle de la narratrice, se laissant porter par ses réactions, sa sensibilité mais aussi ses instincts les plus primaires.

Avec habilité, Jamey Bradbury passe de la narration de Tracy aux pensées qui l'habitent quand elle est envahie par le mental des êtres dont elle s'abreuve sans difficulté et on ne peut définir si elle nous effraie ou si on l'aime.

C'est une écriture de grands espaces, de liberté, de sauvagerie mais sans jamais tomber dans le sanguinaire malgré le sujet. On est happé par cette jeune fille qui se dévoile peu à peu, très pudiquement, ne révélant sa vraie nature qu'au goutte à goutte, faisant monter la pression au fur et à mesure jusqu'à une fin dans la lignée du récit, juste, inévitable mais non prévisible.

C'est un roman d'apprentissage, d'amour, de sensations avec un guide en la personne de Jamey Bradbury dont c'est le premier roman, prometteur et de grande qualité que ce soit au niveau de l'écriture, de la construction mais aussi du sujet.

J'ai été plusieurs fois déstabilisée dans ma lecture, par le sujet, par la personnalité de Tracy, ne sachant pas où elle allait me mener, mais elle a tenue la route, elle m'a touchée par à la fois sa force mais aussi sa fragilité et c'est le genre de lecture qui laisse des traces une fois le roman achevé. J'ai beaucoup aimé justement parce que la construction et le style oscillent entre bestialité et humanité sans jamais franchir la frontière de l'insoutenable, frontière que je n'aime pas franchir.

"Ou en quoi les humains et les animaux étaient des choses si différentes, et comment elle le savait. (p209)"
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