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Citations sur Le Poulpe : Vainqueurs et cons vaincus (3)

ll est cinq heures du matin d'un jour de février qui s'annonce sans nuages et plus froid que la veille. Les rues de tout du noins dans ce quartier, sont désertes. Au volant de son taxi, Renot Briand cherche une victime.
Parce que ça suffit comme ça, bon sang, c'est insupporble à la fin. Les gens ne savent pas ce que c'est, la vie d'un chaufteur de taxi. Douze heures par jour, au volant, dans un embouteillage permanent, les feux tricolores, les coups de klaxon, la maladresse des conducteurs qui ont gagné leur permis à la tombola. Le petit accrochage stupide qui te fout en l'air le radiateur et la clim' et qui t'envoie pointer au chômage va savoir pour combien de temps, à te gratter les couilles, et vivre de l'air du temps, pendant qu'un escroc dans un garage te remplace les pièces endommagées par d'autres encore plus déglinguées. Les bonnes femmes qui changent de voie sans mettre le clignotant, avec de petits rires d'excuse, ou bien ce type qui considère qu'un geste de la main par la fenêtre, ça l'autorise à te couper la route, «Eh, i'y vais, hein !», t'obligeant à un brusque coup de patin suivi d'une humiliante révérence. Je vous en prie, monsieur, passez, monsieur, vous d'abord, je vous laisse la priorité même si vous ne l'avez pas. Et l'autre con qui t'engueule par la fenêtre, t'adresse des grimaces en gesticulant et devient livide dès que tu descends de voiture, que tu lui ouvres sa portière et que tu le chopes par le col, parce que ça suffit comme ça, bon sang, personne ne peut supporter ça. Et les motos qui se faufilent par la droite ou par la gauche, comme des mouches, comme des insectes caparaçonnés qui cherchent à être écrasés, qui méritent d'être écrasés. Un travail solitaire, toute la journée cloué sur le siège, les mains moites sur le volant, l'âme aux aguets, le blasphème aux lèvres. Tu hais tes collègues tous autant qu'ils sont, tu te foutrais sur la gueule avec n'importe lequel d'entre eux, parce qu'ils sont odieux, des mecs odieux qui se soumettent à un travail odieux. Et en plus, des incompris. Un chauffeur de taxi, qui compatit à son sort ?
Personne. L'abruti de client qui est à peine monté qu'il te bazarde sa rengaine : Jospin et le réalisme de gauche, ou Ricardo, N'Gotty, Simone, Le Guen et consorts, bande d'enfoirés. Ou celui qui t'ignore, qui te méprise, qui t'indique par où tu dois le conduire à sa putain d'adresse, comme si tu ne savais pas, toi, par où passer, comme s'il tenait pour acquis que tu es un arnaqueur et que tu l'emmènes par le chemin le plus long. L'imbécile qui te dit qu'elle est pressée mais te prie de rouler doucement : «Pour l'amour de Dieu, j'ai deux filles!» Le gland qui t'offre le double de ce qu'affiche le compteur pour que tu te fraies un chemin au milieu d'un embouteillage, en pensant sûrement que le fric fera pousser des ailes à ta Citroën.
Et les piétons qui risquent leur vie en se jetant littéralement sous tes roues ? La dame avec la poussette, le provo boutonneux qui veut démontrer qu'il n'a peur de rien ni de personne, le gars distingué qui se lance sans regarder sur les passages cloutés parce qu'il est certain que tu t'arrêteras, la vieille qui aurait déjà dû mourir ou qui devrait être en train d'agoniser dans une maison de retraite. Les provocations : «T'es qu'une merde, tiens, même pas capable de me passer dessus.»
- Et pourquoi vous ne leur passez pas dessus ?
Un seul client avait compris Renot. Ce type grand et élégant, au regard paisible, un tic au coin des lèvres. Pas moyen de savoir s'il était sur le point de rire ou s'il ravalait ce qư'il s'apprêtait à dire. Il écouta un long moment les imprécations de Renot avec des hochements de tête compréhensifs et, à la fin
- Et pourquoi vous ne leur réglez pas leur compte? Silence, Un long silence pendant lequel Renot sentit qu'on lui ôtait un poids, pour une fois il n'était pas seul au monde, pour une fois on lui disait ce que depuis longtemps, si longtemps, il avait désiré entendre.
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Que lui fera le Poulpe ? Lui mettre deux claques ? Deux claques suffiront-elles pour venger le viol et l'assassinat de la fille de Valldemossa, incendie du Louis XIII, la mort d'Odile Faon, la mort de la ménagère, celle de l'alpiniste apeurée, celle du montagnard assassin ? Une bonne paire de claques et voilà ?
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1) La seconde victime.
Il est cinq heure du matin d'un jour de février qui s'annonce sans nuages et plus froid que la veille. Les rues de Paris, tout du moins dans ce quartier, sont désertes. Au volant de son taxi, Renot Briand cherche une victime.
Parce que ça suffit comme ça, bon sang, c'est insupportable, à la fin. Les gens ne savent pas ce que c'est, la vie d'un chauffeur de taxi. Douze heures par jour, au volant, dans un embouteillage permanent, les feux tricolores, les coups de klaxon, la maladresse des conducteurs qui ont gagné leur permis à la tombola.
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