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Critique de Jolap


Je ne remercierai jamais assez si-bemol qui m'a très fortement influencée. Elle a aimé ce livre. Ce livre qui, au-delà de son billet, pesait très lourd !
Un poids inestimable, qu'elle a bien fait de partager. Trop lourd à porter seule sans aucun doute. si-bemol, j'ai reçu les mots que vous avez choisis comme on reçoit un cadeau. Et comme le dit Joseph, héros bienveillant de cette histoire, « La vraie pauvreté c'est de n'avoir personne à qui offrir ». Vous êtes riche si-bemol et si j'arrive, derrière vous, à convaincre quelques lecteurs, j'en serais fort aisée !

Au fil des pages étourdissantes de sincérité Joseph et Zika mariés depuis cinquante-cinq ans, échangent des lettres. La maladie les a séparés temporairement. Joseph est installé chez son fils et Zika chez sa fille. Manque de place, proximité des hôpitaux, les choses sont ainsi et il faut bien faire avec.

Difficile de tricher quand on écrit. le langage parlé c'est une chose ! éphémère, spontané, parfois excessif, laconique de temps en temps il s'efface imprécis au premier coup de vent. L'écrit est fixé, réfléchi. Il peut se relire à l'envi et quand ce sont des lettres d'amour qui s'appliquent à graver des sentiments au plus profond, de la manière la plus loyale, la plus vraie, la plus spontanée et en même temps la plus maîtrisée qui soit, ces lettres ne peuvent être que magnifiques !
« Deux jours après mon installation, je suis toujours bien serré dans mon costume de chagrin » écrit Joseph « je réalise que nous venons de clore une grande partie de notre existence et que cette période bénie s'est achevée en quelques pas ».

Et Zica de s'épancher…..un peu en écrivant « toutes ces heures d'éloignement sont une rapine pour notre amour. Si j'ai peur de ce peu qu'il nous reste, c'est que je ne suis pas rassasiée de toi……Je suis plus lucide qu'à vingt ans, c'est maintenant que je pourrais en profiter, aimer, et jouir de cette faculté de clairvoyance qu'on atteint à grand peine. L'âme est anéantie par le poids des organes. »

Le ton est donné. Même si la nostalgie, la privation de l'autre, le retrait momentané signent quelques lettres avec des larmes de noblesse, l'humour teinte la cloche.
Vivre à nouveau avec ses enfants et prendre la distance nécessaire pour se rendre compte « de quel bois ils sont taillés » n'engendre pas la mélancolie parfois. C'est drôle, incisif, sans concession. On ne dit surtout rien. On s'écrit tout. Si sa fille maugrée, Zica en rend compte à Joseph : « ça fermentait dur sous le capot ! » lui dit-elle « Une tripotée de jurons lui sert de rosaire ! »

Ces lettres, le bilan de toute une vie. Rien de vraiment exceptionnel ne transpire dans les domaines professionnels, matériels, culturels. Tout est réussite cependant. Réussite d'un amour partagé qui inonde deux vies parce qu'il est sincère, suffisant, simple et nourrissant. Un socle.

Cet amour de Joseph à Zica, de Zica à Joseph n'a pas eu que des effets bénéfiques, loin s'en faut!
Soudain c'est la chute. L'inondation. le drame. le coup de théâtre en deux actes. Zica et Joseph croyaient être seuls au monde installés dans leur félicité. Mais non bien sûr…la vie serait trop simple!

Les cartes sont mélangées et nous n'arrivons plus à savoir où est le roi, où est la reine. Les larmes, nos larmes à nous lecteurs, reviennent brûlantes, acides, dévastatrices, inattendues.

J'ai beaucoup aimé cette lecture puissante. La lumière qu'elle dégage m'a éblouie comme un soleil souvent, m'a piqué les yeux m'envoyant des vapeurs de mercure parfois, m'a fait rire, m'a enchantée.

Ce récit lumineux est assorti d'un variateur d'intensité très efficace. Je me suis adaptée mais aujourd'hui je ne vais penser qu'à Zica et à Joseph….si tant est qu'ils ne décident de m'accompagner la nuit prochaine dans mon sommeil !

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