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Critique de ALDAMO21


Il y a des jours comme ça, qui commencent sous de bon hospice et puis un grain de sable vient soudainement gripper la machine à bonheur.
Mon rendez-vous avec Agnès Martin-Lugand n'a pas eu lieu.

Peut-être qu'après avoir entendu et lu toutes ces éloges, je m'attendais à un roman d'amour des plus vibrants, comme ceux que je venais de lire. Des belles histoires d'amour-passion, qui parlaient de folie, de fièvre, de désirs brûlants, de sexe, de larmes, avec des mots doux, avec des mots crus qui sentaient à la fois, la transpiration des corps et la désillusion des coeurs.
*

Avec « la Déraison » c'est tout ce que je redoutais d'un roman. Qu'il soit trop cousu de fil blanc, trop prévisible, ce qui a gâché un peu ma lecture.
Il n'a fait que m'effleurer et j'ai ressenti un manque de cohérence et de profondeur.
Son histoire m'a paru improbable, car pour moi, elle n'existe pas dans le vrai monde, avec des êtres qui meurent dans un bonheur absolu, entouré avec des trop-pleins de « je t'aime ».

Certes Agnès Martin-Lugand écrit avec une grande délicatesse, en y mettant beaucoup de sentiments et sa plume est fine et sensible.
Mais parfois cela ne suffit pas !
*

Et puis pour moi, l'auteure a voulu relever deux grands défis.
Déjà celui de décrire les états d'âme d'un homme dépressif et rongé par les souvenirs.

Et là, l'auteure a manqué de vrais mots pour me transmettre la brutalité qu'est une dépression chez un homme.
L'histoire n'a pas eu la moindre résonance en moi !

Et pourtant, la dépression et son amie la schizophrénie, est cette « bête noire » des plus gluantes, qui vient doucement et pernicieusement s'immiscer dans votre esprit. Et lorsque vous vous en rendez compte, il est déjà trop tard.
Cette bête noire, qui vous dépossède d'une réalité pour vous faire basculer et vous engluer dans une autre réalité de vie, où toutes les choses suintent le chagrin, la mélancolie, la tristesse, la grisaille, le disgracieux, l'affreux.
Où il n'y a plus de place pour un seul espoir, une seule envie, un seul sourire.
Une bête sournoise qui vous torture l'âme en vous figeant dans vos souvenirs, en vous faisant ressasser votre passé et vos regrets, jusqu'à l'étourdissement.

C'est elle « l'infâme » qui vous convainc parfois que seule la mort est l'unique option pour vous délivrer de votre souffrance.
*

Il faut des années, des dizaines d'années et parfois une vie entière pour dompter « la bête noire », à coups de désamour, à coups de larmes, à coups de lames de rasoir parfois, à coup de longues journées allongé sur votre lit, à coups de cures de sommeil, à coups de médocs qui vous embrument et vous anesthésient l'esprit, à coup de séances psy.

Il m'a paru bien puéril et illusoire, comme dans le roman, de faire disparaitre une dépression, comme cela d'un seul coup de baguette magique, par un événement émotionnel.
*

Le deuxième défi que l'auteure s'est donné, c'est de parler des sentiments d'une femme condamnée à une mort proche.
Et je me suis posé la question si un vivant en bonne santé était capable d'exprimer au plus près le ressenti d'une condamnée à mort. A moins que cette dernière fasse des confidences.

Agnès Martin-Lugand a bien évoqué ce côté où les personnes bienveillantes et courageuses veuillent cacher leur terreur de mourir, veuillent dissimuler leur souffrance et la faiblesse de leur corps. Veuillent donner une belle image d'elles avant de partir, pour que leurs enfants gardent un beau souvenir, pour ne pas donner plus d'affliction à leur famille, à leurs très proches.

Parce que ce sont eux qui finalement vont rester et vont souffrir.

Mais l'auteure n'a pas abordé toutes les interrogations, toutes les angoisses que nous pouvons peut-être ressentir face à notre mort prochaine et éminente, face à ce vertigineux et grand saut dans l'Inconnu. Face à cette épouvante du vide, du néant.
Parce que la mort n'appartient pas à la vie. Elle est pour certaines personnes « son terminus ». Elle est pour d'autres, un autre état d'être, dans un tout autre lieu, dans une autre dimension.

Et que nous soyons croyants ou pas ne change rien aux grandes questions existentielles que nous nous posons sur la présence du cosmos, sur le mystère de la vie et de la mort.

Peut-être il y aurait de la colère de se dire pourquoi moi ?
De se dire pourquoi dois-je partir dès maintenant ?
Quelle fut la nécessité de ma présence sur terre, si le destin me fait mourir si jeune ?
Qu'est-ce que l'univers ?
Qu'est-ce que la vie ?
Qu'est-ce que la mort ?
Pour quelle raison, dans quel but l'existence du monde des vivants ?
Qui crée l'existence et pourquoi ?
Quel est le sens de la vie ?
Qu'est-ce que le temps ?
Peut-on quantifier ce que représente une seconde ?
Qu'est-ce que l'âme éternelle ?
Que représente un souffle de vie par rapport à une éternité ?
*

Qui suis-je ?
Pourquoi toutes ces questions ?
Combien d'années me reste-il avant de rencontrer « la Grande Faucheuse ».
Combien de livres aurais-je encore le temps de lire.
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