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Critique de Bartzella


Angoissant.
Quelque part dans le temps, quelque part sur la route, tout est gris. le ciel, le sol, l'eau, le soleil, les vêtements, la peau. Dans toutes les teintes de gris. Tout est mort depuis longtemps, faune comme végétation, mais la cendre continue de tomber. Dans le froid, la pluie, la neige, l'humidité, où que le regard se pose, le décor est gris. Sale. Pourri. Détruit. Corrodé. On ne sait pas ce qui s'est passé.

Sur la route, deux personnages dépourvus de noms. "Il" c'est le père, "le petit" c'est son fils. Tous deux avancent sur la route et se cachent dès que quelqu'un approche, bivouaquant à l'écart, à l'abri des arbres morts et des regards avec le peu de ressources qu'ils possèdent. le monde tel qu'il est devenu est des plus dangereux, mieux vaut éviter tout contact avec autrui, si jamais autrui il y avait. Nulle part, il n'y a âme qui vive. On dirait un monde vide. Triste. Gris. Leur but; quitter le nord froid pour rejoindre un sud peut-être un peu plus clément, qui sait. Ils ne savent pas ce qu'ils vont trouver là-bas. À l'aide d'une carte en lambeaux, ils sillonnent la route vers le sud. La route, on n'en connaît pas le point de départ ni le point d'arrivée. C'est la route, point final. Un lieu sans âme, fil conducteur seulement.

C'est un "format" d'écriture comme je n'en ai jamais vu. J'avais peur que cela me rebute. Les phrases sont construites avec peu de virgules et beaucoup de conjonctions "et" (parfois jusqu'à 4 ou 5 !) au sein d'une même phrase. Les dialogues, peu nombreux d'ailleurs, sont construits parfois comme une phrase ordinaire dans un paragraphe (le même que celui sans dialogues), incluant les deux interlocuteurs, ou comme des vers de poèmes, le tout sans tiret. Il n'y a pas non plus de chapitres. Seulement une succession de petits ou gros paragraphes.

À première vue, c'est étrange. Au début, c'est un peu agaçant mais on s'habitue vite au style. Surprenant mais l'auteur a réussi à trouver la bonne recette et façonner le tout pour que cela fonctionne. Les conjonctions "et" répétées donnent l'impression que les actions du père et du fils sont faites de façon plutôt mécaniques, machinales, un enchaînement de nécessités dans leur morne, dur et souffrant quotidien. Cela donne un certain rythme, haché, à des actions déplaisantes pour eux.

Le fait que les personnages n'aient pas de noms ne m'a pas dérangée. Cela a pour effet que l'on ne développe pas d'attachement particulier à aucun d'entre eux. On ne leur identifie pas une personnalité propre. On ne sait pas tellement à quoi ils ressemblent, ils pourraient être n'importe qui d'entre nous. Ceux qu'ils croisent également. le focus est plus sur ce qu'ils vivent et leur condition physique que sur leur apparence. Cela crée une sorte de distance, de froideur qui correspond à cet univers gris.

Puisqu'il n'y a aucuns chapitres non plus, nous avons l'impression qu'ils ne font jamais de pause. Qu'ils n'ont pas le choix de continuer à avancer, coûte que coûte. Les jours succèdent aux nuits, les nuits succèdent aux jours, ne leur laissant aucun répit entre chaque tranche de la journée. Les actions sont lentes mais je pense que cet enchaînement continuel de paragraphes contribue à faire passer l'histoire plus vite. En tous cas, on ressent peu la lenteur. Pourtant, la misère, elle, frappe de plein fouet et on sent qu'elle est toujours là. La tension, aussi !

En fait, j'ai bien aimé ce roman pour ces petits détails particuliers qui en font toute l'essence. Ces détails sont plus une force qu'une faiblesse, en tous cas dans ce roman-ci. Je ne pense pas que cela marcherait bien tout le temps ou dans n'importe quel livre. Et même s'ils ne sont que deux, qu'ils parlent peu et qu'ils tentent de survivre au jour le jour en avançant un pied devant l'autre, je ne l'ai ni trouvé long ni ennuyeux. C'est l'histoire d'un père et de son fils qui tentent de survivre un jour à la fois dans un monde dévasté, froid et hostile, ni plus ni moins. Peu de moments joyeux en perspective pour eux. Un climat où personne n'aimerait se retrouver. C'était d'un réalisme effrayant. Espérons ne jamais connaître ce monde-là !

J'avais déjà vu le film et c'est avec ces images en tête que la progression de ce petit roman s'est effectuée. Bien apprécié les deux. Un environnement dont on ignore la cause mais où on subit toutes les conséquences. Un très bon divertissement en tous cas, qui passe vite et qui fait froid dans le dos. À lire sans faute !

LC THÉMATIQUE DE DÉCEMBRE : LE RETOUR DE L'HIVER
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