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Critique de ulysse13003


Christian Merlin s'attaque dans cette vaste biographie collective à l'histoire de la plus fameuse phalange de la musique classique. Les Philharmoniker sont créés en 1842, à une époque où les musiciens de l'Opéra d'Etat de Vienne sont très mal payés. Pour compléter leur maigre salaire, ils décident de se constituer en une société privée afin de répartir entre eux les recettes des concerts qu'ils donneront en plus de ceux donnés à l'Opéra. A partir de 1869 puis 1870, ils jouent dans deux magnifiques salles, l'Opéra de Vienne où sont données les oeuvres lyriques, et le Musikverein où sont jouées les oeuvres symphoniques. Au fil des décennies, on voit l'orchestre s'étoffer dans chaque pupitre afin de pouvoir jouer des symphonies de plus en plus exigeantes en terme d'effectifs.
Ce livre est à la fois une histoire musicale, sociale, politique. Les relations entre les membres du Philharmonique et leurs chefs ne sont pas, loin s'en faut, sereines. Les rivalités entre musiciens émaillent aussi l'histoire de ce groupe qui doit concilier des egos et des ambitions parfois contradictoires.
L'antisémitisme traverse tout le XXe siècle. Présent au début du siècle à l'époque du mandat du maire de Vienne Lueger, il va se déployer sans vergogne après l'Anschluss et conduire à l'éjection manu militari de 17 de ses membres. Ainsi, Arnold Rosé, "Konzermeister" de l'orchestre depuis 1881. Il sera contraint de s'exiler en Angleterre. Sa fille sera déportée.
Il refusera de rejoindre l'orchestre après la guerre, arguant que plus d'une cinquantaine de ses membres sont d'anciens nazis.
Il y a dans le livre de Merlin des passages un peu fastidieux où il égrène les noms de tous les membres des pupitres, au fur et à mesure de leur renouvellement. Ce sont les limites de la prosopographie, un exercice largement utilisé dans l'histoire romaine pour décrire les carrières des consuls, gouverneurs et membres de l'ordre équestre durant l'Empire.
Il n'en reste pas moins que ce livre est un certain portrait de l'Autriche, un pays qui a eu plus de mal que l'Allemagne à se défaire de son passé nazi, car l'Etat fut à la fois victime et bourreau, si j'ose dire.
Autre point qui révèle le caractère très conservateur de cet orchestre, il n'intégra de femme dans ses rangs qu'en 1997 ! Alors que d'autres orchestres européens accueillaient de nombreux musiciens étrangers, il donna longtemps la part belle à ses ressortissants.
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