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Critique de Takalirsa


Un cocktail de nouvelles surprenantes autour du métier de musicien classique.
Écoutez les anecdotes de ce psychologue spécialisé dans les pathologies d'orchestre ! Entre poésie et humour, cynisme et passion, folie et désespoir, nul doute qu'elles vous déconcerteront (ah ah) au point que vous ne saurez plus si vous avez envie de rire… ou de pleurer (« En réalité, il ne savait s'il devait se réjouir ou non de cette expérience qui illustrait la déchéance du musicien d'aujourd'hui »).

Oslo, flûtiste dans le métro, se voit confier par le ministère de l'agriculture la mission de jouer… dans une serre pour des plantes. Vous trouvez la « mise en scène incongrue » ? Sachant qu'il sera prouvé scientifiquement que la musique fait du bien à la terre (« la musique classique entraîne une croissance accrue des plantes »), l'expérimentation me semble au contraire très poétique ! Elle montre surtout la nécessité de se renouveler dans une profession qui connaît la crise…

C'est la raison pour laquelle Margot, claveciniste reconnue, a accepté un concert privé dans un château. Mais malgré son talent, elle ne verra que de loin le milieu aristocratique qui l'a recrutée le temps d'un soir… La chute, inattendue, laisse amer. Norman aussi est frustré : ce pianiste est devenu riche et célèbre grâce… à des jingles de pub. le musicien « ne supporte pas d'avoir réussi dans un domaine qu'il méprise » et se trouve désormais incapable de composer. Mais alors, de qui proviennent les mélodies que son voisin entend à travers la cloison ? La réponse frôle la folie…

Il faut dire que « les problèmes personnels sont souvent amplifiés par la musique » dans ces « histoires édifiantes » ! D'où viennent les plaques d'eczéma de Katia ? Son allergie a-t-elle à voir avec sa mère qui l'a forcée à faire du violon à l'âge de 13 ans ? Il est saisissant de voir la force de la rancoeur… Pour Marie-Elisabeth, la petite amie de Kevin, le traumatisme englobe la famille entière. Jusqu'où le trompettiste ira-t-il pour que sa bien-aimée cesse de produire ces « notes torturées » avec son violon ?

Avec Dominique et Hubert, la musique soulève la question de l'identité. S'il est vrai que « les patients ont tendance à s'identifier à leur instrument », il n'est pas étonnant que Dominique ait choisi l'alto, cet instrument « ange, androgyne, au timbre voilé, ambigu »… comme lui. le récit est inattendu, il part d'une paralysie des membres au moment de jouer pour remonter aux traumatismes d'une enfance passée à s'entraîner au point d'effacer tout questionnement au sujet de soi (« Tout ce que la musique lui a permis d'éviter »).
Quant à Hubert le chef d'orchestre, s'il mène les musiciens à la baguette pendant les concerts, savourant le plaisir sadique de les humilier, il révèle dans l'intimité un net penchant pour les jeux masochistes… Claire la violoncelliste trouvera là le moyen de se venger.

Mais l'histoire la plus folle, la plus violente, la plus saisissante selon moi, c'est celle de Jo le contrebassiste cuisinier qui s'apprête à prendre sa retraite après trente ans passés dans l'orchestre de l'opéra de Nice. Est-il vraiment prêt à laisser sa place à un jeune ? En tout cas, ses bons petits plats vont manquer à ses collègues ! Tiens, d'ailleurs, il n'a jamais voulu dévoiler ses recettes… Je vous mets au défi de deviner la fin ! Et si vous la trouvez, vous m'inquiétez...

Instrument imposé, passion chronophage voire dévorante, frustration de sa place dans l'orchestre ou au contraire pression liée à son rôle, désespoir de voir sa profession délaissée... Il faut espérer que tous les musiciens classiques ne soient pas dans la réalité aussi instables que dans ce recueil… Avec des troubles aussi touchants que terrifiants, on hésite à continuer de les fréquenter !..
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