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Critique de Mioon


Jeux Olympiques obligent, les valides se donnent bonne conscience en s'intéressant vaguement aux handicapés, et auteurs comme éditeurs ne veulent pas louper le coche. J'imagine déjà les critiques parler de manga ''inclusif'' - ''engagé pour la tolérance'' - ''vecteur de beaux messages et de grands espoirs pour ce pauvres petits handi''... snif, sortez les mouchoirs, il est temps d'être émotif. Et pourtant, ne nous voilons pas la face : business is businss, et ce genre de manga s'adresse donc non pas à des handi, mais bien à des valides qui souhaitent flatter leur égo en expliquant ''combien ils sont tolérants'' puisqu'ils lisent ce manga. Pour ceux qui ne l'auraient pas compris, je suis moi-même handicapée, raison pour laquelle ces bouquins me dégoutent : parce qu'ils sont dégoulinants de validisme !

Sans surprise, c'est d'ailleurs Akata qui remet le couvert cette année, après avoir sorti l'ultra problématique ''Running Girl'' pour les précédents JO (pour plus de précisions, je vous renvoie vers ma critique du-dit Running Girl, un manga ultra validiste et intolérant qui avait bien plu, preuve que les valides ont décidément un énorme problème avec la glamourisation du handicap...).

Ici, ''Fends le vent !'' est moins problématique que ''Running Girl'', mais il comporte quand même quantité de soucis :

- Shôta est un jeune homme handicapé, amputé d'une jambe. le chapitre 1 nous montre bien qu'il n'est pas super jouasse, mais ''beau message'' oblige, le manga n'insiste pas là-dessus et préfère insister sur le fait qu'il apprend à courir avec une lame en un seul claquement de doigts ! Si le manga avait mis en lumière les difficultés de Shôta, il y a fort à parier qu'il aurait été taxé de misérabilisme, et comme ce bouquin s'adresse en priorité aux valides plutôt qu'aux handi, alors il est évident que c'est leur point de vue qu'il faut adopter : celui, rassurant, qu'un handicap est ''une chance dans la vie, quelque chose qui permet de se dépasser et d'être inspirant, et qu'il ne génère absolument aucune difficulté''. Urgh, le validisme, ce joli message...

- Chidori l'orthoprothésiste sort de nulle part, dispose de prothèses parfaites pour Shôta et hop, emballé c'est pesé ! Oui parce que ce métier n'est pas du tout rare et que des orthoprothésistes, on en croise 20 à chaque coin de rue. On notera également le caractère assez ''limite'' de ce personnage qui vit en pleine glamourisation du handicap et prend tout comme un super cadeau de la vie.
Petite précision d'ailleurs : en France, si tu as besoin d'une prothèse pour faire du handisport, il faut être riche, parce que ça coûte une blinde et que rien n'est remboursé. Autant dire que sans un compte en banque bien garni, c'est mort.

- les infos sur les prothèses sont apportées par le pote de Shôta qui vient régulièrement l'encourager, dans une sorte de remake de ''l'effet Intouchable'' à savoir : un handicapé ne peut rien faire tout seul, il a besoin d'un gentil valide pour lui faire découvrir son handicap et aussi lui apprendre combien la vie est magnifique.

- bien sûr, il suffit que Shôta participe à une course pour devenir la célébrité du lycée, avec des filles qui sont trop faaaaans ! Oui dans la réalité aussi, chaque fois que je mets une boite de petits pois dans mon caddie, tout le monde me fait une haie d'honneur.

Ami handicapé, tu n'as donc pas le droit de souffrir ou d'avoir des difficultés (c'est interdit qu'on te dit !), et non tu ne peux pas t'en sortir tout seul, tu as nécessairement besoin des valides (parce qu'ils ont un égo fragile qui a besoin d'être flatté en aidant les pauvres choses comme toi). Ah et ami handicapé, n'oublie pas un point important : tu dois être inspirant ! Tu dois faire de grandes choses ! Non tu ne peux pas être secrétaire, comptable, mère de famille ou agent d'accueil à la SNCF (ah non là sérieusement, vu l'accessibilité à la SNCF, qui risque d'être rudement rigolote pendant les JO d'ailleurs, tu peux vraiment pas !). Tu ne peux pas te contenter d'avoir ta vie tranquille, tu es obligé d'être inspirant pour rassurer les valides et confirmer qu'un handi, c'est forcément un super héro !

En bref, encore un manga problématique !
(Hé Akata, moi j'attends encore des mangas ''beaux et inspirants'' sur le racisme, les violences conjugales, les LGBTphobie et les morts d'enfants... nous expliquant que tout ça, c'est pas grave, et que ces sont des petites épreuves pas bien méchantes qu'on traverse avec un beau sourire... non, toujours pas ?)
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