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Critique de raton-liseur


Je ne sais d'où je tiens cet a priori qu'Octave Mirbeau est un homme hautain. Eh bien la lecture de ce recueil de nouvelles semble me donner raison. Si ce livre s'est exporté au-delà de nos frontières hexagonales, je comprends pourquoi les Français sont considérés comme un peuple bougon et irascible.
Octave Mirbeau, misanthrope patenté fuyant la capitale et la vacuité de sa vie mondaine, s'installe à la campagne dans un endroit indéterminé qui fait penser à la Normandie ou à l'ouest de Paris, espérant y trouver la vérité du travail dur de la terre (tant que ce n'est pas lui qui travaille, mais il aimerait tant regarder les autres peiner, car là est la vraie vie), les sentiments rudes mais vrais (tant qu'il n'est pas question de lui, trop délicat pour de tels rapports humains). Mais quelle déception de trouver la campagne aussi corrompue que la ville. Il espérait le tableau de Millet et il trouve des scènes dignes de Jan Steen. Sous forme de lettres écrites à chacun de ses amis connus (Maupassant, Hyusmans et d'autres), et peut-être « à la façon de » (mais ma connaissance superficielle de la littérature ne me permet pas d'en juger, seulement de le soupçonner), il livre ses observations et ses sentiments, sous forme d'anecdotes ou de tableaux.

Hélas, cette lecture est bien poussive bien que je ne sois en général pas rebutée par les auteurs pessimistes ou ironiques. Mais rien, absolument rien ne trouve grâce aux yeux de Mirbeau et il le fait partager au lecteur avec un ton méprisant que je n'ai pas supporté. Son quant-à-soi, sa façon désagréable de faire comprendre qu'il est au-dessus de la mêlée, tout cela m'a dérangée, irritée, et j'ai eu du mal à terminer cette lecture.
Le seul point positif de la lecture d'un tel râleur est que, contre toute attente, il m'a fait penser que le monde actuel n'est finalement peut-être pas aussi mauvais qu'il y parait, en tout cas pas pire. S'il y a plus d'un siècle on parlait déjà de décadence dans les mêmes termes mais de façon plus ampoulée qu'on le ferait aujourd'hui (les sociologues des banlieues n'exposeraient pas mieux la situation que l'accusé de la nouvelle « L'Enfant » ; les réseaux d'influence qui gangrènent nos milieux politiques n'ont rien à envier à ceux décrits dans « La Chasse » et la guerre a toujours de beaux jours devant elle comme le montre la nouvelle « La guerre et l'homme »), si le monde apparaissait déjà comme perdu, c'est que soit notre agonie est plus longue que prévue, soit qu'il faut arrêter d'être un esprit chagrin et de croire que c'était nécessairement mieux avant. Ma conclusion, à la sortie de ce livre, et je ne suis pas certaine que Monsieur Mirbeau la partage, est que, certes l'homme ne progresse pas, mais il ne recule pas non plus, Sisyphe inconscient qui fait du sur-place depuis des siècles.
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