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Critique de 5Arabella


Le très grand succès des Précieuses ridicules, pièce créée en 1659, incite Molière à poursuivre dans la veine de la petite comédie en un acte. D'autant plus que le départ pour le théâtre du Marais de Marquise Duparc, l'obligeait à différer la création de sa pièce plus sérieuse, Don Garcie de Navarre. En 1660 Marquise revient dans la troupe de Molière après l'interruption annuelle de Pâques, mais les créations de grandes pièces ne se font pas avant l'automne, quand tout le public est de retour à la capitale. En attendant, il faut attirer les spectateurs, et une petite pièce comique est idéale pour cela. Ce sera Sganarelle ou le cocu imaginaire, donné pour la première fois le 28 mai 1660. Ce sera la première pièce dans laquelle Molière va interpréter le rôle de Sganarelle, qui remplace le personnage de Mascarille, dans lequel il se glissait jusqu'à cette date. Ce changement n'est pas qu'un changement de nom : en enlevant le petit masque avec lequel Molière jouait Mascarille, il se donne la possibilité de changer son interprétation. A partir de ce moment, il va fonder son jeu sur l'expressivité grimacière du visage.

Sganarelle ou le cocu imaginaire entrecroise deux intrigues. Celle de deux jeunes amoureux, Célie et Lélie promis l'un à l'autre. Mais Gorgibus, le père de Célie décide de marier sa fille à un meilleur partie, et lui enjoint de faire bon visage à son nouvel promis. Mal en point, elle perd le portrait de son bien aimé, ce qui enchaîne avec le deuxième couple, Sganarelle et sa femme (qui n'est pas nommée dans la pièce). Cette dernière récupère par hasard le portait, ce qui entraîne la jalousie quelque peu intempestive de Sganarelle. Par contre-coup, le portrait dans les mains de Sganarelle fait croire à Lélie que Célie a épousé ce dernier malgré toutes ses promesses. Tout finira par s'éclaircir et le mari choisi par Gorgibus aura l'obligeance de contracter une autre union. La pièce pourra donc se terminer par un mariage et par la réconciliation de Sganarelle avec son épouse.

Cette pièce reprend un certain nombre d'éléments et de procédés déjà utilisés par Molière dans ses pièces précédentes. Ainsi la pièce reprend la fausse apparence au Dépit amoureux, les malentendus, les quiproquos sont le moteur de l'action, provoquent les brouilles amoureuses, et font avancer la pièce. Par ailleurs le thème de la jalousie est un grand sujet de débat, tout particulièrement dans les milieux galants, parodiés dans Les précieuses ridicules. Dans Sganarelle, le personnage principal adopte une attitude jugée ridicule dans ces milieux : celle d'afficher une jalousie violente et publique, à partir d'éléments très minces, et qui se révéleront erronés au final ; une attitude de bourgeois traditionnel rétrograde. Cette façon nouvelle de présenter la jalousie, qui fait résonance avec les débats de l'époque, donne une actualité à la pièce, et vise la connivence avec une partie des spectateurs.

Sans connaître le triomphe des Précieuses ridicules, la pièce aura du succès et permettre de remplir les caisses du théâtre, et elle connaîtra aussi une édition pirate, qu'au final Molière va tolérer, parce que la justice oblige l'éditeur à lui verser une somme pour chaque exemplaire vendu. La publication des petites pièces devient ainsi la règle.
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