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Critique de Nastasia-B


Inaltérable Gerda Muller ! Elle qui faisait déjà les belles heures des Albums du Père Castor dans les années 1950-60, en illustrant notamment des albums devenus cultes au rang desquels on compte Boucle D'Or Et Les Trois Ours, cher au coeur des fondateurs de Babelio, ou bien encore Les Bons Amis ou Marlaguette.

Eh bien figurez-vous que Gerda Muller est toujours dans le coup fin 2014 avec cet album des Quatre Musiciens de Brême, en véritable Hokusai du livre jeunesse, elle qui fêtera bientôt ses quatre-vingt-dix printemps. Elle a même pris — notoriété oblige — quelques galons dans l'entrefaite car elle a migré du Père Castor à l'École des Loisirs.

Mais hormis ce léger changement dans l'estampille, l'esprit, le style, le trait, l'ambiance sont restés exactement les mêmes qu'à l'époque bénie des trente glorieuses où ses albums s'adressaient aux grands-parents des enfants auxquels ils s'adressent aujourd'hui. À telle enseigne que, — fait exceptionnel — sitôt sortie, cette adaptation du célèbre conte des frères Grimm, Les Musiciens de Brême, celle-ci fait déjà figure d'album ultra-classique qu'on s'offrira de mère en fille pour se rappeler le grand vieux temps.

Un trait simple mais réaliste, qui évoque dans les premières pages le plat pays qui est le sien (les Pays-Bas) pour peu à peu s'enfoncer dans une germanique forêt digne des Nibelungen ou à peu près.

Voici un conte qui prend tout son sens quand on essaie de l'interpréter, et plusieurs interprétations peuvent se défendre, sans nécessairement s'exclure mutuellement.

En premier lieu, la thématique du vieillissement, de la prise d'âge et de maturité, j'irai même jusqu'à l'acquisition de sagesse et du savoir. L'âne tout d'abord, puis le chien, puis le chat et enfin le coq, tous, en raison de l'affaiblissement (selon leurs maîtres respectifs) de leurs capacités (sauf dans le cas du coq) sont sur le point d'être remplacés et donc soumis à une mort certaine, décident de fuir pour échapper au trépas qui les attend dans leur ancienne fonction. Seul le coq n'est pas accusé de faiblir, mais est sacrifié à des intérêts qui lui sont jugés supérieurs.

Je ne peux pas m'empêcher de voir dans ce conte une magnifique allégorie du licenciement boursier ou économique dans le seul but d'accroître la rentabilité, au détriment des salariés qui ont pourtant trimé toute leur vie et qu'on sacrifie comme de vieilles chaussettes puantes, sans considération de l'être qui habite les mains du travailleur.

Tous quatre décident de s'adonner à leur hobby, la musique nocturne (je vous laisse soupeser le nuage d'ironie qu'il y a là-dessous), en la municipalité de Brême, et surtout de s'unir dans cette nouvelle vie. J'y vois quant à moi une allégorie de la retraite, dédiée au loisir, perçue telle une échappatoire à l'exploitation jusqu'à la corde que nous proposent nos employeurs, une invitation à se soustraire à la vie active, pour entamer une nouvelle vie, moins laborieuse, mais qui elle est réellement une vie.

Enfin, nos quatre compères, non parvenus encore à destination de Brême, sont contraints de faire étape pour la nuit. Prêts à se contenter d'un spartiate abri en forêt, ils détectent non loin d'eux un havre qui leur semble plus prometteur. C'est un repaire de brigands...

Que va-t-il advenir, je vous le laisse découvrir, mais... et s'il s'agissait d'une discrète invitation à s'unir et à se révolter contre ces voleurs qui nous saignent quotidiennement ? Allez savoir !

Mais ceci n'est que mon avis et la seule chose qu'il faut en retenir c'est : " Chapeau Gerda ! ", le reste n'a probablement pas beaucoup d'importance…
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