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Critique de Ortie27


“A peine le bout de mes doigts effleuraient-il le bord du sommeil que déjà je me réveillais."


Haruki Murakami nous emmène avec habilité et subtilité dans la vie d'une femme trentenaire, femme au foyer, mariée à un dentiste, ils ont un fils assez jeune.

Les jours s'enchaînent et se ressemblent. Des journées identiques, scellées à celles de son mari et de son fils. Elle prépare les repas, s'occupe du ménage, de faire les courses. C'est son quotidien routinier depuis des années. 


Jusqu'au jour où elle est réveillée par un cauchemar atroce et un cri indicible  que ses cordes vocales sont dans l'incapacité de produire, ce cri intérieur se distille en elle, partout, l'accapare… enfermé dans son corps. Cette nuit-là, elle tremble, elle est face à sa peur, face à l'incompréhension, au temps qui passe, et repasse, sans qu'elle ne soit vraiment dans la vie alors elle va dans son salon et se met à dévorer un Tolstoï : Anna Karénine dont elle se passionne. Elle peine à se souvenir de ce qui lui donnait du plaisir avant d'être esclave de son rôle de femme mariée et de mère, puis se souvient alors qu'à l'époque la lecture avait été au centre de sa vie et se demande alors ce que cela représentait pour elle… cette énorme quantité de temps à lire !  A vivre des aventures par procuration, les imaginer, vibrer pour elles. Pourquoi ? Remplir un manque, un vide, se réfugier peut-être ? Murakami ne nous apporte pas les réponses sur un plateau, il laisse le lecteur imaginer ce qu'il souhaite comme à son habitude, c'est exaltant.

Ses nuits se répètent, avec un même rituel, elle n'est pas fatiguée et son esprit est parfaitement clair.

La journée elle effectue encore et toujours ses tâches quotidiennes, mécaniques, c'est un robot et ne pas dormir ne lui fait plus peur.

Tout ce qu'elle souhaite, c'est qu'on la laisse tranquille dans son coin pour lire et nager une heure par jour, et par-dessus tout garder sa liberté. Et pourtant, personne dans son entourage ne semble percevoir les changements profonds qui sont nés en elle, personne pour voir qu'elle a changé. Personne ne s'intéresse à elle, voilà une évidence.

Son quotidien cristallisé semble l'ennuyer profondément, et elle ne sait comment s'en défaire, comment exprimer l'indicible, comment sortir de ce modèle familial, de cette place et son cri muet en est le symbole. Elle garde tout en elle, se fige, s'oublie. 

Prendra t-elle des décisions importantes pour vivre en accord avec ses nouvelles attentes et gagner en plénitude, se laissera-t-elle gagner par la folie? Murakami nous laisse sur une fin ouverte et je le remercie pour cela. 

Et vous, à quoi ressemblent vos nuits ? Vous avez lu cette nouvelle ?
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