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Critique de ATOS


ATOS
21 décembre 2016
C'est le premier jour de l'hiver et pour annoncer ce jour de neige, j'ai eu bonheur et donc le privilège d'entendre le retour de très belles voix d'Algérie. Poésie. « Quand l'amandier refleurira ». … C'est le premier arbre fruitier à fleurir à la fin de l'hiver, période où il gèle encore le matin.
Le premier à refleurir pour annoncer le Revivre.
Poésie.
Samira Negrouche, poète , a choisi de rassembler dans ce recueil onze poètes algériens contemporains de langue française.
Cette langue française, cette « blesse » , étrange étrangère familière , langue de rivage, et d'exil, langue de terre et de départ . Cette matière ni première ni élémentaire mais qui s'est reforgée, musclée, régénérée, réinventée, par les mots de celles et ceux qu'elle a si longtemps maintenus sans parole.
Cette langue aiguisée et non policée, «  ce butin de guerre », ce cri, cette remontrance, cette mémoire, ce dit, cette innocence, cet amour, cette enfance.
« Nous sommes paroles sous l'écriture «  écrit le grand passeur de mémoire : Patrick Chamoiseau.
Oui j'écoute l'Algérie et j'entends les Caraïbes. Sororité de la « géopoétique ».
Nous avons tellement à saisir, à entendre de ces mots. Ces mots polis, ouverts, frottés à même l'attente, le silence, les colères, l'espoir et l'émerveille.
Tellement de couleurs et de souffle dans ces mots que nous recevons comme un cristal, comme un pétale porté par la mémoire des sables. Un éclat.
Qu'avons nous à parler d'autre que de Poésie ? Qu'avons nous d'autre à nous donner, à nous transmettre que cette lumière ?
« Redessiner le mirage », «  relâcher le bord du ciel », tenter l'autre traversé. Passé. «  hier tu voulais savoir si et voilà que tu ne sais plus pourquoi », voilà que s'avance « la réponse à l'oubli du temps » de Samira Negrouche.

Il faut entendre cette musique. Musique universelle. Chant tressé de chemin d'hommes, poésie de l'empreinte, de la trace, de la voile et du cordage. Des encres qui dessinent l'envol d'une lèvre.
La première neige, la première main, le premier mot. le même dessein.

Écrire c'est avancer en laissant derrière soi la souvenance d'un rêve et dessiner devant soi l'enfance d'un nouveau jour . Écrire comme bâtir.
Lire s'est rencontrer, bivouaquer, et partager. Lire comme partir.
Voilà comment les hommes voyagent.
«  et nous nous dirigeons vers toi sereins la foulée large ainsi que déjà sortis de la nuit installée »- Malek Alloula,Approchant du seuil ils dirent, extrait.

Ne pas renoncer, mais partir, à la rencontre de l'autre , à l'intérieur de soi.
Partir en quête, avec rêves et promesse , quitte à tout perdre alors aimer, aimer à tout reprendre, tout, y compris ce qui blesse. Greffer, vivifier, nourrir, au nom du revivre.
« entre le silence du père et les plaintes de la mère », émanciper le vivre en ouvrant au grand large.
Rendre un possible différent .
«  (j'ouvre une parenthèse mais ne la ferme pas, écrit Hamid Tibouchi.

Malek Alloula, Habib Tengour, Hamid Tibouchi, Mohamed Sehaba, Youssef Merahi, Hamid Nacer Khodja, Yamilé Ghebalou, Samira Negrouche, Amine Aït Hadi, Mohamed Mahiout, Djamal Amrani. Leurs noms comme la résonance d'un parfum d' étoile. Comme un gemme posé sur le seuil. La promesse de tous nos retours. Poésie.

« Une porte ouverte vers un archipel d'oasis insoupçonnables ».

Entre le ciel et peau, entre le corps et la lumière, entre la vie et le nombre, entre la peur et le mensonge, entre désir et liberté, entre la nuit et ses secrets, entre notre coeur et la première vague. ... 
« Lumière au sourire d'Elsa et d'Aragon, dis à l'injustice de l'homme les couleurs de ta raison » - La vie toute la vie, Hamid Nacer Khodja. Extrait.

Solstice d'hiver, décembre 2016, je lis ce matin qu'il neige sur le Sahara, cela faisait trente sept ans qu'il n'avait pas neigé dans le Sahara algérien. « Quand l'amandier refleurira », je sais qu'au printemps reviennent toujours les oiseaux.
Il neige sur Encelade depuis cent millions d'années. Mais Encelade ne connaît pas son histoire. Rien, absolument, rien n'est impossible.
Je vous invite à découvrir ou relire ces poètes. Pourquoi sinon, pour qui , écrirai-je tout cela ?

Je vous invite également à découvrir les très belles encres d'Hamid Tibouchi qui accompagnent merveilleusement l'ensemble de ces textes .

Astrid Shriqui Garain


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