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Critique de Andromeda06


Choisi à la bibliothèque uniquement pour son titre (il me fallait lire un livre avec le mot "minuit" dans le titre), "Il n'est jamais plus tard que minuit" est le premier et le seul livre à ce jour d'Isabelle Never. Publié en avril 2018, il est visiblement peu connu (à ce que j'en constate), mais je dois dire être contente de l'avoir déniché et de pouvoir vous en parler.

Il y a six mois, Jeanne a perdu son mari et ses deux filles dans un tragique accident d'avion. Seule à Paris, s'isolant de tout et de tous, elle décide de retourner en Birmanie, là où elle a ses plus beaux souvenirs de famille, là où elle a tout perdu... Sans savoir ce qui l'attend vraiment, n'attendant plus rien de la vie et se complaisant dans son malheur en s'accrochant à un passé qu'elle ne veut pas oublier, il y a devant elle un long travail de reconstruction et d'acceptation. Elle y croisera quelques personnes qui, consciemment ou non, l'aideront peu à peu à sortir la tête de l'eau, à trouver son chemin vers un "demain" moins douloureux.

À travers le travail de deuil de Jeanne, Isabelle Never nous raconte et décrit sa Birmanie, celle où elle a vécu plusieurs années. On ressent clairement son amour pour ce pays, son expérience. Et c'est avec brio qu'elle a implanté son contexte. Je n'avais encore jamais lu de livres dont l'action se déroulait là-bas. J'ai pris plaisir à découvrir un peu de son Histoire, son mode de vie, à comprendre sa situation géopolitique et socio-économique. J'ai perçu l'atmosphère typique que l'autrice a instauré pour son histoire : la pauvreté et l'inconfort, la privation de certaines libertés et la dictature, les mentalités et états d'esprit de la population (bien différents des Occidentaux), mais aussi l'activité grouillante, la chaleur étouffante et bien évidemment le rôle du bouddhisme dans la vie de chacun. Les lieux et décors sont également facilement imaginables, joliment décrits, et avec réalisme.

Au premier abord, l'histoire de Jeanne n'a rien d'original, le thème de la reconstruction de soi après un deuil ayant déjà été abordé un certain nombre de fois. Mais implantée dans ce décor, ça passe comme une lettre à la poste. D'autant que l'autrice se démarque également par son personnage principal, Jeanne. Plutôt insignifiante au début, j'ai vite compris qu'un caractère bien trempé se cachait derrière sa tristesse et sa colère. Narrée à la première personne, l'histoire de Jeanne n'est que cheminement intérieur et questionnements. C'est souvent éprouvant, douloureux. On est au plus près de ses pensées intimes. On ressent, tout au long de la lecture, sa douleur, son désespoir, sa colère, son incompréhension, sa solitude, ses remords, sa nostalgie des jours heureux, le vide qui est en elle... Ses souvenirs et anecdotes du passé, qui arrivent sans crier gare, sont écrasants. On recherche avec elle un sens, des explications, des raisons à ce drame.

À part les quelques personnes qui croiseront son chemin, les quelques moments et discussions qu'elle partagera avec eux, et les différentes étapes du voyage qu'elle entreprend sans connaître sa destination finale, Jeanne est seule avec elle-même. Pas d'action, puisque tout n'est qu'introspection, spiritualité et enfin méditation. Et il me faut dire que le tout est assez bien maîtrisé, même si j'y ai perçu quelques longueurs de temps à autre.

Isabelle Never use d'une plume plutôt charmante, percutante, très sensible, poétique ou philosophique quelquefois, et extrêmement touchante. Ce premier roman, qu'on pourrait classer dans le genre "développement personnel" et qui mériterait d'être un peu plus connu, a ses moments souvent tristes et douloureux, mais fait preuve de sagesse tout du long, et est de plus en plus lumineux au fur et à mesure qu'on s'approche de la fin. L'autrice utilise également un humour très subtil, ce qui m'a permis de sourire autant de fois que j'ai retenu mes larmes.

Elle m'a, par contre, totalement perdue dans la dernière partie, l'aspect spirituel s'étant trop rapproché, à mon goût, de l'aspect religieux. Mais c'est une fin logique, en continuité avec le travail intérieur de Jeanne.
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