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Critique de Fleitour


Est-ce l'histoire d'un homme de l'IRA ou bien le portrait d'une femme, Joséphine, confrontée à une situation nouvelle pour elle, héberger ou pas l'un de ses membres, recherché pour crime.
Dans ce remarquable roman "la Maison du Splendide Isolement", Edna O'brien, cette irlandaise du comté de Clare, nous bouleverse, et n'hésite pas à nous prendre à contre-pied.
Car nous sommes d'abord directement concentré sur l'Irlande du Nord et les engagements dans lesquels son héros Mc Greevy, ce combattant pour une Irlande réunifiée se bat, et pendant un temps se cache.


Pour ma part, ce splendide isolement est bien l'occasion unique pour cette grande romancière hors du commun de dresser le portrait étonnant et émerveillé sur ce que peut être une femme irlandaise, à priori si éloignée des combats qui agitent cette énième réunification, mais qui parle avec bon sens, page 130 elle affirme, "Eh bien faite-le, nom de Dieu!...Sans pour cela tuer et estropier des personnes innocentes !"


Tout le passé de cette femme l'entraîne naturellement vers le respect de l'autorité présente en Irlande, ce respect est plus le sentiment d'appartenir au peuple irlandais, moins le devoir d'être conservatrice de ses avantages ou de sa situation. Ce respect de l'Irlande s'exprime naturellement dans celui de la hiérarchie catholique, respect plus nuancé quand elle parle des autorités administratives et policières, où une pointe de regard critique affleure, à sa mémoire comme à sa blancheur de peau.

Page144 elle avoue, "avoir reconnu son sourire à partir de photos présentées à la TV", puis au policier Rory, qui lui demande, "avez-vous vu cet homme ?" Là elle répond page 228, "Je n'ai pas la télévision". "Quelqu'un de solitaire comme vous l'êtes"?, "Je considère votre question comme offensante, en ce cas faites votre travail, c'est votre boulot de le trouver".


La qualité romanesque proposée tient beaucoup à l'espièglerie de Josie, à son indépendance intellectuelle, à son esprit caustique qui ne fera que croître à mesure que les événements deviennent plus tragiques ou plus sombres, comme si les problèmes de Mc Greevy, étaient sollicités pour mieux rendre le personnage de Josie, pour mieux la comprendre de l'intérieur, tel un tableau en négatif de la narratrice Edna O'Brien.

Il est aussi un domaine inattendu ou l'on va pouvoir déguster la prose de la romancière, et son féminisme qui s'exprime dans les relations amoureuses, avec une inventivité, une drôlerie à laquelle je ne m'attendais pas.
Notons ces trois sorties,
"Il haïssait la façon qu'elle avait au lit de s'encamisoler dans sa chemise de nuit, telle une momie amidonnée."
"Elle ne veut pas que ce soit gaspillé, sur l'herbe, elle en veut, ça en elle, être embrasée."
"Les femmes elles ne sont jamais contentes, on leur cède et la vie devient un enfer, on ne leur cède pas, et c'est encore l'enfer..."


Toute l'originalité du récit est de faire basculer la tension, de Franck Mac Greevy , vers cette femme, qui voit sa vie basculer, de la sérénité douce d'une femme isolée, à la responsabilité, qu'elle va progressivement assumer, jusqu'à s'affirmer devant les policiers qui l'interrogent.


Josie est prise par ce dilemme, dénoncer et le protéger car il finira en prison, ou tenir bon, et trouver les moyens pour aider le fugitif, malgré les soupçons qui se dirigent vers cette maison isolée vers son splendide isolement. Car c'est tout le contraire qui se fait dans sa tête, de la compréhension de l'homme elle ira, en effaçant un passé dans lequel elle n'a pas pu s'épanouir, vers un destin indéchiffrable..


Face à cet homme taillé dans une seule pièce, convaincu de se battre pour la bonne cause, une conviction que rien ne peut entraver, Joséphine montre une personnalité bien plus complexe, plus attachante sans doute, prête à la compassion, prête à comprendre, ce qui pour elle, est totalement incompréhensible.
Edna O'Brien dans ce face-à-face obsédant réussi à nous faire vibrer, et ressentir combien le drame irlandais, contient de pièges pour lesquelles les femmes n'étaient pas du tout équipées, pour surmonter tant d'épreuves.
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