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Critique de ElGatoMalo


Serge Bramly dans sa biographie de Léonard de Vinci cite un extrait du Traité de la peinture de Cennino Cennini où ce dernier, s'adressant au "jeune homme que l'amour de l'art enflamme", lui conseille d'obéir totalement au maître choisi. Il est même question "de se mettre en servitude" pour le plus long temps possible. Treize ans lui semblent une durée convenable pour passer d'apprenti (discepolo) à compagnon (garzone), puis de compagnon à maître (maestro) : un an consacré au "dessin sur tablette", puis six pour se familiariser avec le matériel qui ne s'achète pas tout prêt, qu'il faut confectionner soi-même - pour apprendre à fabriquer les brosses, cuire les enduits, à maroufler les toiles sur panneau de bois de tilleul ou de saule, à reconnaitre et à préparer les couleurs, qui sont broyées presque quotidiennement parce que l'on n'a pas les tubes ni les liants qui permettraient de les conserver en pâte, à appliquer l'or des fonds, épousseter, gratter, égrener, retailler" ; puis six encore pour apprendre à colorier, à "orner de mordants", à faire les draperies d'or, à œuvrer sur mur — et cela "en dessinant toujours, en n'abandonnant jamais le travail, ni jour ouvrable ni jour férié »...

On est bien dans l'Italie de la Renaissance, à Florence au début du XVIe siècle. Arte n'est pas un "jeune homme" mais une jeune femme. Elle ne peut pas choisir son maître car personne ne veut d'une femme dans son atelier. C'est donc un maître taciturne et bougon, Leo, sans apprenti, qui la choisit, elle. Son apprentissage est beaucoup plus court même si l'auteur fait allusion à une durée possible de six années. Sa passion pour le dessin et son activité autodidacte lui permettent d'avancer beaucoup plus rapidement. C'est même bien, bien avant la fin du premier volume que lui est confiée la responsabilité d'une première création - un décors urbain - sur un tableau de Léo, en collaboration certes, mais surtout en explosant la chronologie établie par les témoignages historiques. On est bien loin des treize années proposées par Cennini dont on peut facilement imaginer que la longueur aurait lassé même le plus assidu et le plus obsessionnel des lecteurs d'interminables feuilletons manga.

L'histoire (à mon avis très librement inspirée de la vie d'Artemisia Gentileschi) est donc dynamique, enthousiaste et vivante. Les problèmes sont nombreux mais l'héroïne s'en tire chaque fois avec beaucoup de chance (heureusement pour elle dans une Italie de la Renaissance qui n'a vraiment rien à voir avec celle que décrit Régine Detambel dans La Splendeur) et une étonnante fraicheur toute juvénile (Shōjo - style de manga à public visé de jeunes filles - oblige semble-t-il ? quoique la fin, plus sombre, mettant en scène une courtisane, tire un peu sur le style Josei - style de manga destiné à un public de jeune femme adulte). Les dessins, très fouillés et très détaillés, sont mignons tout plein. L'ensemble est très agréable à lire, un vrai régal. Je regrette cependant que pour économiser sur quelques malheureux centimètres de papier, les images soient aussi réduites à l'impression. Quoique d'une grande netteté, certains commentaires en a parte qui doivent certainement passer sans difficulté en calligraphie japonaise sont vraiment à l'extrême limite du lisible en français.
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