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Critique de allard95


On sait que Bernard Ollivier, retraité dès l'âge de 60 ans, a voulu consacrer son temps à la marche. D'abord, 2000 kilomètres jusqu'à Compostelle, et ensuite, un projet moins banal: 12000 kilomètres d'Istanbul à Xi-An, en 4 périodes. Ce premier livre est le récit du trajet qui devait le mener d'Istanbul à Téhéran, soit probablement 2300 ou 2500 kilomètres. Il se trouve que, après 2 mois de marche, une dysentrie amibienne l'obligera à terminer cette étape à Dogubayazit, au pied du mont Ararat, à moins de 50 kilomètres de la frontière iranienne: il sera rapatrié par son assureur de ce lieu vers Istanbul en ambulance, puis d'Istanbul à Paris en avion. Et prévoira de reprendre le même chemin, après son rétablissement, exactement à partir du lieu de la fin réelle de ce premier parcours, vers Téhéran, vers Samarcande, et vers Xi-An.
Quel est l'intérêt de ce premier récit? Essentiellement, dans deux aspects inédits de son expérience: B.Ollivier voyage à pied, et seul. Beaucoup d'autres ont fait des parcours comparables, mais à deux, ou à trois, et en voiture, ou au moins, à vélo: ce qui est très différent ! Nicolas Bouvier, par exemple, a raconté excellement son propre périple ("L'usage du monde"): ils étaient deux, et avaient une (modeste) voiture.
Mais N.Bouvier voyageait au début des années 50: avant la télévision, avant la voiture pour tous, dans des pays intacts, dont les populations n'entrevoyaient rien ou presque du monde moderne à venir. Bernard Ollivier, par contre, voyage à la charnière des années 2000: ces presque 50 ans d'écart ont tout changé, ou presque: laideur des constructions neuves et anarchiques, destruction du patrimoine, prépondérance des véhicules motorisés, pour ce qui concerne le "matériel", et appât du gain, cynisme et matérialisme, pour ce qui concerne l'humain. Et ce qui reste d'avant est ce qu'il ne faudrait pas: l'oppression des femmes, et une violence ordinaire stupide.
Bien entendu, les paysages grandioses d'Anatolie sont là, B.Ollivier fera de belles rencontres, de généreux hôtes lui donneront, souvent et gratuitement, le gîte et le couvert. Mais il sera aussi souvent interpelé, menacé, fouillé, inquiété, parfois par les autorités, et aussi par maints individus sans scrupules.
Aussi, ne doit-on pas constater ceci: ces terres ne sont plus vierges, et les esprits ne sont plus purs.
B.Ollivier a voulu connaître ce qu'ont vécu, avant lui, les commerçants qui arpentaient la "Route de la soie". Il aura entrevu cela, un peu, mais aura vu aussi une nouvelle laideur, matérielle et humaine.
Pour voyager, pour découvrir vraiment le monde, autrement qu'en faisant des selfies dos aux montagnes ou aux palais d'antan, il est probablement trop tard.
Et si l'éditeur ("Phébus") a eu l'idée, logique et excellente a priori, d'ajouter une carte du parcours, on doit déplorer ceci: elle est à peu près illisible !
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