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Critique de zazy


Marion est architecte et a construit la maison du n°10 d'une résidence. Avec son mari, ils ont acheté le n° 12, l'autre étant occupée. A chaque revente, elle a toujours espéré que… Mais non, le sort s'acharne, impossible de déménager dans l'autre maison. « Avoir conçu la maison de quelqu'un d'autre comme si c'était la sienne propre, habiter juste à côté, mais jamais dedans, en devenir obsédée . Et maintenant, laisser une fois de plus échapper l'insaisissable trophée entre les mains d'une personne qui dessine des gribouillis et appelle ça design ». Mère de quatre enfants qui ne lui parlent plus ou peu sans faut, elle a dû arrêter et revendre ses parts du cabinet à la naissance difficile du quatrième. Son mari est mort les ayant ruinés.
Celle qui dessine des gribouillis, c'est Hortensia. Designer de renommée mondiale, spécialisée dans les tissus (vous comprenez mieux la « douce » ironie de Marion). Avant, elle et son mari habitaient en Afrique. Peter est blanc et elle, noire, couple mixte donc et sans enfants
Toutes deux octogénaires sont voisines. Elles habitent dans le quartier chic d'une banlieue du Cap. Jusque là, rien de plus normal, mais cela se corse.

Marion, souvenez-vous, nous sommes en Afrique du Sud, il fallait voir sa tête et sa réaction lorsqu'elle s'aperçoit que les derniers acquéreurs sont un couple mixte,  Ô sacrilège ! Une noire va vivre dans ce qu'elle considère SA maison. « En arrivant dans leur nouvelle maison, Hortensia s'était rendu compte qu'elle serait la seule propriétaire noire de Ekaterina. Elle avait éprouvé du dégoût envers son environnement, envers la haute bourgeoisie blanche bien protégée du voisinage et, pendant ses mélancoliques moments d'intimité, elle éprouvait aussi du dégoût envers elle-même. »
Débute une joute entre les deux femmes et je dois reconnaître que, côté mauvaise foi, Hortensia explose. Elle ne va aux réunions de quartier que pour contrecarrer toute velléités de racisme, surtout proférées par sa chère voisine Marion. OK, Marion, de par son éducation est un brin raciste, voir le bouquet entier, même en faisant de gros efforts ; l'histoire du papier toilette en est une belle image.
C'est dans une de ces réunions du comité que doit se débattre l'affaire de l'achat aux autochtones du terrain à vil prix, plutôt de l'expropriation déguisée, selon une loi inique. Depuis la fin de l'apartheid, des renégociations sont en cours même si une des propriétaires blanches sort « La vente s'est faite équitablement. Ils l'ont eue à un bon prix . Parfois ça arrive. ». Hortensia, normalement, du côté noir, a opposé un refus, temporaire il faut en convenir, à la demande d'Annamaria d'enterrer les urnes sous les arbres d'argent de son jardin. Beulah, la petite-fille « Vous… Les Blancs dites qu'il faut oublier et se tourner vers l'avenir. Mais…. On doit aussi se rétablir. Parfois on se tourne vers l'avenir et on reste malades, alors à quoi ça rime d'aller plus avant ? On doit aussi se rétablir. Ma grand-mère ne voulait pas oublier. J'ai toujours pensé que c'était dû au fait qu'oublier serait la même chose que se perdre, ne pas savoir où on est. »
Un jour, Hortensia décide de rénover la maison et d'y porter de grands changements extérieurs. La grue arrive et, mal calée, fonce dans le mur de la maison de Marion, ouvre une grosse brèche. Faut-il y voir un clin d'oeil au mur de Berlin ? Hortensia finit par offrir l'hospitalité à sa voisine, ce qui n'empêche pas les piques, les empoignades… Faut pas rêver.
La cohabitation entre les deux femmes peut être un résumé de l'après apartheid où chaque communauté, chaque race, se regarde, se jauge, se méfie, fait trois pas en avant et un en arrière. On ne change pas les mentalités du jour au lendemain.
Yewande Omotoso remonte dans le passé des deux femmes pour nous amener à appréhender leurs caractères bien trempés et mieux comprendre leurs réactions.
J'ai aimé les seconds couteaux que sont Agnes, bonne chez Marion et Bassey homme à tout faire, plus proche du collaborateur, chez Hortensia.
Un livre truculent, alerte, ironique, drôle qui, par ce jeu de rôles, permet de mieux comprendre les relations entre les blanc et les noirs en Afrique du Sud, forcés de partager l'espace public. Les Africains du sud doivent passer de la haine raciste ancestrale, le mépris à la tolérance, la cohabitation, l'acceptation de nouvelles relations.


Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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