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Critique de Marie987654321


Débutant comme le récit des souvenirs de l'enfance bretonne de la petite Mona, le récit devient insensiblement la réflexion d'une philosophe sur l'identité de la France à partir de sa trajectoire intellectuelle de fille de militants bretons anticléricaux devenue spécialiste de la révolution française et de l'histoire de l'éducation ("La république des instituteurs", coécrit avec son mari Jacques Ozouf) entre l'héritage familial et celui de l'école française.

Le père de Mona meurt très jeune. Sa mère, institutrice doit l'élever seule, aidée par sa propre mère dans les années 30. La petite Mona grandit entre l'école française, la culture bretonne seule admise à la maison et la religion chrétienne. Elle est imprégnée de la littérature bretonne et de ses légendes avant de découvrir les lettres françaises. Elle plonge dans la bibliothèque bretonne de son père, figure tutélaire toujours présente.
De cette enfance partagée, Mona fait le fondement d'une vision personnelle de la question de l'unité nationale, dans sa version française centralisatrice et parfois excluante, et de la diversité culturelle.

La fin de l'ouvrage présente une réflexion sur la Révolution française et les différentes conceptions de la république qui se sont affrontées : opposant la version jacobine d'une communauté soudée dans une unité émotionnelle qui impose sa vision du centre vers la périphérie et la version des "brissotins" moins unanimistes, voyant en la diversité une chance d'équilibre qui se construit du bas vers le haut. Elle souligne que cette république complexe n'avait pas une chance : "Des temps aussi troublés appelaient la rapidité de la décision et la volonté héroïque des hommes, non les méandres de la délibération et les calculs de la raison."

Elle se poursuit par une analyse de la politique de Jules Ferry, comme assouplissement du modèle jacobin.

Puis nous retrouvons le temps présent et la discussion sur les communautés, la crainte de "balkanisation" en "communautés juxtaposées".

"Toutes ces interrogations peuvent être ramenées à une question essentielle, celle même que j'avais trouvée entre école et maison : faut-il penser qu'entre l'obligation d'appartenir et la revendication d'indépendance nulle négociation ne peut s'ouvrir? qu'entre les attaches et la liberté, il y a une invincible incompatibilité? L'interrogation est d'autant plus insistante qu'en réalité chacun de nous abrite en lui l'une et l'autre de ces exigences."

Le jugement est clair sur les "pourfendeurs du communautarisme".

"A les en croire, le moi qui se laisse enfermer dans ses fidélités et sa mémoire singulières et fasciner par ses origines est non seulement fermé à l'universel, mais doit renoncer aussi à l'authenticité, à la conquête de son "vrai" moi. le corollaire de cette sentence est que la seule voie pour accéder à la liberté consiste à se dégager de ses appartenances"

Et plus loin critiquant cette conception
"La fidélité aux êtres qu'on aime, la pratique d'une langue, l'entretien d'une mémoire, le goût pour les couleurs d'un paysage familier ou la forme d'une ville, autant de servitudes.... elle voit dans toute détermination une limite et un manque."

Pour autant, l'auteur ne sombre pas dans le relativisme absolu où tout aurait la même valeur, la liberté étant le principe non négociable.

Inévitablement la réflexion se poursuit par la question de la parité, du port du voile à l'école et des langues régionales. Concernant le port du voile, Mona Ozouf a évolué : d'abord favorable à laisser les jeunes filles le porter, en se référant à la manière dont Jules ferry avait réglé le problème de la croix à l'école c'est à dire en prenant le temps et en veillant à ne pas heurter, elle a fini par considérer que ce signe particulier là n'était pas seulement un signe religieux librement choisi mais la marque de l'inégalité et de la privation de liberté de celles qui y seraient contraintes par leur entourage.

Une lecture qui m'a beaucoup intéressée mais le sous-titre " retour sur une enfance bretonne" prête un peu à confusion sur ce qu'on va y trouver.
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