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Critique de ValentinMo


Malgré une couverture colorée et une quatrième de couverture digne d'un roman, ce livre - qui n'est pas une oeuvre de fiction - décrit une réalité bien sombre. Avec « Made in China », paru en français à l'occasion de la rentrée littéraire 2022, la journaliste américaine Amelia Pang, dont les origines sont ouïghours et chinoises, propose un essai fort bien documenté sur le travail forcé des prisonniers d'opinion et des minorités ethniques en Chine.

Le livre débute en 2012 avec Julia Keith, une ménagère américaine qui découvre dans un paquet de décorations d'Halloween bas de gamme - produit évidemment importé de Chine - une lettre écrite trois ans plus tôt dans un mélange de mauvais anglais et d'idéogrammes chinois. Son auteur, Sun Yi, est un ingénieur détenu depuis 2008 dans un camp de travailleurs forcés à Masanjia (province du Liaoning) qui tente tant bien que mal d'interpeller le consommateur étranger sur ses conditions de vie. L'affaire devient très rapidement médiatique. Est ainsi révélé au grand public, l'existence de ces camps de rééducation par le travail forcé qui quadrillent la Chine.

Cet appel à l'aide est le point de départ d'une minutieuse enquête sur la violence du quotidien et les conditions d'hygiène déplorables de ces milliers détenus dans ces « goulags chinois » qui participent aux exportations économiques florissantes du pays. Ils sont brutalisés, mal nourris et travaillent plus de quinze heures par jour - sans repos hebdomadaire - pour fabriquer des produits d'exportation à vil prix (jouets, vêtements, composants électroniques, etc.).

Le point de départ et le travail éditorial laissent à penser qu'il s'agit d'une oeuvre de fiction mais il s'agit bien malheureusement de faits réels, comme expliqué dans l'épilogue. Chaque chiffre, témoignage ou affirmation est d'ailleurs documenté dans un glossaire très complet en fin d'ouvrage.

Le travail de documentation est colossal et il faut bien avouer que le lecteur a parfois l'impression de lire une thèse sur le sujet. Reste que la thématique y est passionnante et, surtout, la journaliste américaine Amélia Pang ne se contente pas de constater l'existence de ces camps. Elle en explique les raisons et envisage des solutions pour encourager une évolution de la part des autorités Chinoises à ce sujet.

Amelia Pang considère notamment que les consommateurs doivent agir à leur niveau pour dénoncer et boycotter les entreprises chinoises utilisant de véritables esclaves modernes. Elle propose également la création d'un label « sans Laogai » pour promouvoir les entreprises et les marques vertueuses.

Cette « consommation éthique » pourrait ne pas être si dérisoire qu'elle le paraît à première vue car la Chine, pays fortement exportateur, n'est évidemment pas insensible à la perspective de moindres débouchés commerciaux en Occident.

Une prise de conscience des consommateurs s'impose d'autant plus que les Chinois se sont jusqu'ici adaptés sans trop de difficultés à une législation occidentale peu regardante, dans les faits, sur les conditions de production des marchandises.

Ce travail de sensibilisation d'Amelia Pang mérite donc d'être amplement diffusé afin que les consommateurs occidentaux s'interrogent en conscience sur l'origine réelle des produits « made in China » qui leur sont proposés.

Une enquête journalistique passionnante qui allie à la fois la force romanesque d'un roman et la pédagogie de haut niveau, caractéristique d'un essai. Malheureusement, ce livre est injustement passé inaperçu malgré un sujet plus que jamais d'actualité.
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