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Critique de Wictoriane


Titre original : Titus Alone, 1959
Dans le troisième opus Titus aborde le "nouveau" monde fait de fureur, de technologies inconnues, un monde qui ignore tout de Gormenghast, un monde qui l'ignore, lui. J'ai immédiatement songé à Reith, le voyageur du cycle de Tschaï (Jack Vance). Comme lui, il erre dans des mondes étrangers, trouve de l'aide mais doit toujours se résoudre à partir. Mervyn Peake est un homme moderne et visionnaire. Dans ce dernier volet, il parle des laissés pour compte, les abrite dans un monde souterrain ou plutôt sous-marin (sous le fleuve qui sépare les deux villes), une sorte de cour des miracles où vivotent dans cette grotte suitante ceux qui préfèrent être enterrés vivants qu'être morts dans une insensible urbanité. Mervyn Peake a inventé un monde fait de nos hantises et de nos rêves. Un univers où se côtoient l'absurde et l'attendu, où se frottent l'indulgent et l'éxécrable, où se heurtent bonté et ignominie, un monde qui ressemble au nôtre. Certains trouvent (je l'ai lu), que la fin du roman est plutôt "chaotique et confuse" à cause de la maladie de l'auteur. Je n'ai pas eu cette impression. En revanche, je reste sur ma faim quant au devenir de certains personnages attachants (Belaubois, le docteur Salprune...), mais déjà dans le deuxième tome, les morts de Fuschia et celle de la Créature arrivent bien trop brutalement. J'ai envie de dire "tout ça pour ça" et j'ai mal au coeur. Je me souviens, lorsque Keda était enceinte, qu'elle sentait que son enfant était surnaturel, je m'attendais à un destin plus mystique. Je suppose qu'il en est de même avec toutes les "saga" : les personnages vont et repartent avec leur vie propre qui nous échappe aussi sûrement qu'il y a toujours au moins une faute d'orthographe dans un menu chinois.

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S'il faut en terminer...

Ce qui perdure à la lecture des volumes de Titus c’est l’impression de s’ébattre dans une gigantesque volière. Les personnages ressemblent tous, à un moment de leur vie, à un oiseau. Le cercueil lui-même est assimilé à une cage. Mervyn Peake a ceci de particulier, c'est d'avoir un style charismatique. Son écriture prend corps sous nos yeux. Enfermée jusqu'à la prochaine page, elle s'échappe, nous agrippe les yeux dans un envoûtement infini. Elle est une puissance menue mais formidable à laquelle je ne résiste que le temps d'une courte pause. Voilà un homme qui manie le cruel et l'absurde sur le même plan, avec la même passion. Mervyn Peake est délicat et puissant. Tout ce qu'il a écrit, je l'ai vu. Tout ce qu'il a décrit, je l'ai compris. J'ai dû le lire à petite gorgée, comme pour éviter d'être saoûle et imperméable aux visions distillées avec art. J'ai dû le lire avec des gants de prudence, des repos isothermes pour éviter de me brûler. J'ai mis du temps pour venir à bout de l'histoire de Titus, non pas que ce soit ardu et malhabile, mais riche, si proche de moi que j'en avais le vertige. Oh ! Je ne suis certes pas la seule à avoir subi ses retombées comme des larmes de poésie, je ne prétends pas avoir l'exclusivité d'être tombée sous son charme. Oui, d'autres se sont inclinés devant Titus, moi je m'agenouille, je me recroqueville, comme retournée dans l'œuf, aux origines primitives. L'heure de la première cellule.

A mon tour, je voudrais convaincre les plus courageux à entreprendre la lecture des trois tomes, soient plus de 1330 pages, de création à l'état pur. Car il s'agit bien de cela. Les personnages, les lieux, leurs facultés, leurs coutumes. Tout est fantastique. C'est Dune sur une planète qui ressemble à la nôtre, le ver géant en moins.
Lien : http://baigneedevoslangueurs..
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