Citations sur La trilogie de Gormenghast, tome 3 : Titus errant (43)
« Sur les jeunes traits de Titus était écrit quelque chose qui n’était pas jeune. Quelque chose d’aussi ancien que les pierres de sa demeure. Quelque chose d’intraitable. » (p. 163)
Tu tiens ta bougie bien droite, mais au lieu de l'obscurité vide,
tu as devant toi une grille.
Au pied de la grille, il y a une écuelle noire, retournée.
Dessous, tu trouveras une clef.
Ce n'est peut-être pas la clef de ta misérable vie,
mais c'est celle qui t'ouvrira la grille.
« Il sait seulement qu’il a laissé derrière lui, du côté de l’horizon qui s’éloigne, quelque chose de démesuré. Quelque chose de brutal ; quelque chose de tendre. Quelque chose de mi-réel ; quelque chose de mi-rêvé. La moitié de son cœur. La moitié de lui-même. » (p. 18)
Elle le haïssait car elle ne pouvait pas l'aimer.
Il était inaccessible.
Son amour était ailleurs, là où fleurissait la poussière.
Tournant son regard sur la fenêtre suivante,
il aperçut un autre visage minuscule.
Un frisson lui glaça l'échine et il ferma les yeux,
mais cela ne lui fut d'aucun secours car l'effroyable bruit doucereux
sembla bourdonner plus fort dans ses oreilles
et un lointain relent de mort lui emplit les narines.
Il ouvrit de nouveau les yeux.
Dans chaque fenêtre s'encadrait un visage,
chaque visage le regardait et, chose plus terrifiante que tout,
chaque visage était le même.
- J'ai eu peur de la sphère volante.
Elle m'a suivi jusqu'à ce que je la brise.
Et quand je l'ai brisée, elle a soupiré.
Et j'ai oublié mon silex.
Sans mon silex, je suis perdu... plus encore qu'avant.
Car je n'ai rien d'autre pour prouver d'où je viens,
pour prouver l'existence de ma terre natale.
Et ce n'est une preuve valable que pour moi.
Cela ne prouve rien à personne qu'à moi.
Je n'ai rien dans les mains.
Rien qui me convainque que ce n'est pas un rêve.
Rien pour prouver la réalité de mon existence.
Rien pour prouver que nous sommes ici, en train de parler dans cette pièce.
Rien qui prouve l'existence de mes mains ou de ma voix.
Et la sphère !
Cette chose pensante !
Pourquoi me suivait-elle ? Que voulait-elle ?
Est-ce qu'elle m'espionnait ? Est-ce de la magie ou de la science ?
Saura-t-on que je l'ai brisée ? Me poursuivra-t-on ?
- Prends un cognac, dit Musengroin.
N'avez-vous jamais pris le monde dans vos mains
comme un enfant prend une coupe de cristal de toutes les couleurs ?
N'avez-vous jamais aimé ce monde ridicule qui est le nôtre ?
- Dieu merci, elle est passée maintenant.
- Quoi ?
- Ma jeunesse. Je l'ai eue trop longtemps dans les pattes.
A présent ce n'était plus qu'un souvenir,
une ride sur le temps, une rêverie
ou le bruit d'une clef qui tourne.
Quant à toi, va de l'avant. Dévore la vie. Vois du pays. Voyage dans ta tête. Voyage à pied. Pour te retrouver en prison vêtu de haillons crasseux ! Ou connaître la gloire dans une voiture dorée ! Enivre-toi de solitude. Ce n'est qu'une ville. Ce n'est pas un endroit où s'arrêter.