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Critique de nadejda


Ce livre est déstabilisant par la forme du récit, une écriture où les phrases et les mots sont scandés, répétés parfois comme si le narrateur les cherchait ou voulait retrouver le refrain d'une chanson aimée qui l'a emporté et bercé mais qui fait mal en faisant revivre des souvenirs très beaux mais disparus.
Le narrateur est écrivain et par son écriture il donne vie à son amour pour une femme qui lui apparaît , vous savez, quand on ferme les yeux :
«Je fermais les yeux et voyais, voyais ce qu'on voit les yeux fermés. Je voyais le noir au-dedans de moi et les points de lumière qui le brisent, les vagues de lumière, les figures abstraites de lumière, les silhouettes de lumière, les ombres de lumière dans la lumière du noir en moi. C'est ce que nous voyons quand nous fermons les yeux et continuons de voir : la couleur noir et les petits êtres de lumière qui l'habitent. Et l'on ne parvient à fixer son regard ni sur le noir, ni sur la lumière.
......
Puis, lentement, toujours très lentement, les points de lumière formèrent des cordons de lumière : des lignes de lumière par-dessus le noir. Ensuite commença de surgir chaque contour d'un visage et d'un corps. Un à un, très lentement, très doucement, commencèrent de surgir les traits du plus beau visage que j'eusse jamais vu, et du corps le plus beau que j'eusse jamais vu. Un corps de lumière sur le noir. Une femme. Je la regardais jusqu'à l'instant où elle fut complète.»


Il redonne vie, dans le silence intérieur où se forment les phrases et où les ténèbres peuvent se dissoudre, à une femme qui est décédée mais il ne le sait pas alors qu' elle renaît à l'ombre de ses paupières closes.
Le monde extérieur sombre, vide, sans attrait va devenir un monde de cruauté et de mort avec la venue d'envahisseurs barbares.
Pour l'écrivain la souffrance endurée, la mort et la peur qui l'enserrent ne seraient rien si 
la femme aimée qui vivait en lui ne disparaissait :
«En tous les points que je sentais, le froid amassé de la peur et des nuits de peur. Sur ma peau, le froid de l'obscurité qui m'avait touché au toucher de la tombe de celle qui était partie d'en moi, disparue par un chemin d'en moi, d'en mes propres ténèbres, pour retourner peut-être à son tombeau, à l'obscurité noire de sa tombe.»

Je crois, si l'on pénètre dans le monde créé par ce jeune écrivain, que le bouleversement s'opère. Cela a été mon cas et il me reste des moments inoubliables de beauté poétique, protégés de la cruauté ambiante, qui touchent au plus profond et auxquels je repense souvent. Par contre je peux comprendre que l'on puisse aussi y rester totalement hermétique car cette lecture est vraiment déroutante.
Mais faites confiance à l'auteur quand il dit : "Ces mots étaient miens et ils étaient siens. Ces noms étaient miens, ils étaient en moi, comme aussi en elle. Nous étions deux personnes partageant un secret de mots. Deux personnes qui, au loin, avaient partagés des instants. Deux personnes, et en nous tout était pareil."
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