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Critique de Bouvy


J'ai reçu ce livre dans le cadre d'une opération masse critique et je remercie Babelio et les Editions Anne Carrières pour me l'avoir confié.

Le titre du livre est trompeur. Il n'est que le nom éponyme du premier chapitre. Le plombier n'est l'objet que de vingt-huit pages. Quand j'ai eu fini ce premier chapitre, je me suis demandé ce que j'avais reçu comme ouvrage. Celui d'un journaliste fauché en quête d'argent facile en nous pondant un titre racoleur. Profitant d'un évier bouché et de l'intervention d'un vrai plombier, Michael Petkov-Kleiner en profite pour lui poser une question existentielle. Est-ce vrai, ce cliché du film pornographique, qui utilise abusivement l'image du plombier qui se rend chez un client, qui est accueillit par l'épouse BCBG qui, voyant les mains virils du travailleur manuel, sent se réveiller en elle ses instincts de femelle lubrique qui voit en cet homme en bleu de travail, la bête de sexe idéale pour une bonne partie de jambe en l'air. De la, le plombier se vante un peu, raconte que quand il était célibataire, dans sa profession, les pourboires étaient souvent payés en nature. De là, le journaliste trouve un sujet d'investigation et commence par mater des films pornos avec des plombiers comme sujets principaux ou comme simple amorce de films hots. Il nous décrit qu'il se masturbe en regardant les films ou extraits mais commence aussi à interroger des auteurs, des acteurs et actrices, des producteurs et productrices de ce genre de film. Là, je me dit, c'est quoi ce bouquin, dois-je obligatoirement me le taper jusqu'au bout en ayant le préjugé qu'il ne mène nulle part. Mais l'auteur, à partir de cette enquête légère et pas très fouillée, du moins, moins profonde que les sexes des bourgeoises qui se tape le travailleur manuel forcément débordant de testostérone, découvre que la pornographie pourrait peut-être répondre à ses grandes questions existentielles. A partir de là, je laisse tomber ce livre, je l'abandonne. Mais, je vois le temps courir et je n'ai pas fait mon devoir de « Masse Critiqueur » et le délai fatidique pour publier ma critique arrive. Profitant de mon confinement obligatoire, au moins, ce p****** de coronavirus m'aura servi à quelque chose, tel un apnéiste qui se prépare sans bonbonne à plonger dans les fonds marins, à terminer ce livre avec qui j'ai très mal commencé une relation.
De l'évier bouché, l'auteur, durant son enquête, a entendu que les hommes aussi devraient tous se faire déboucher. De là, il part pour une nouvelle « sexeploration ». Le plaisir anal et prostatique, souvent tabou et inconnu chez la gente masculine, de peur d'atteindre à l'intégrité de la toute puissante virilité. J'avoue que le monde du plaisir de la fleur de rose m'est aussi assez inconnu, qu'il reste dans mes fantasmes inassouvis. Sans doute ai-je toujours eu peur d'en parler à ma femme et que cette zone pourtant si érogène n'a été que peu explorée chez moi, sans doute effrayé qu'elle ne croit que je fait un coming out ou ne révèle une part de moi bisexuelle. Le préjugé général classant trop souvent les empapaoutés dans la catégorie homosexuelle. L'auteur n'hésite pas à s'impliquer personnellement. Son investigation le conduit à la découverte d'une certaine Nathalie et de son collègue Adam qui organisent des ateliers d'exploration de plaisir prostatique. La découverte et l'expérience de notre auteur semble quelque peu décevante, le nirvâna n'est pas atteint, sans doute par manque d'expérience et de confiance en soit. Mais ce défit va ouvrir la voie du troisième chapitre, le godemiché. Le texte change, gagne en profondeur. Le discours se fait enfin plus philosophique, plus politique. Le godemiché devient un outil libertaire, révolutionnaire, anarchiste. Il devrait libérer les femmes du joug patriarcal. Mais malheureusement, son succès est tel qu'il est récupéré par le capitalisme. Il devient alors contre-révolutionnaire, un « social-traître ». Les illusions du journaliste s'étiolent. Il perd pied, est déstabilisé dans ces plus profondes convictions sociales. En plus, qui profite de cette manne remplie de dollars ? Les mecs. Mais il lui reste un espoir et il découvre, nous fait découvrir la règle 34. Celle qui dit que « Si ça existe, il y a du porno à ce sujet » est une règle qui suggère que sur n'importe quel sujet, il existe un équivalent pornographique. » Donc, tout est potentiellement pornographique. Voilà la totale liberté qui reprend ses lettres de noblesse. En plus, si on lui ajoute la règle 35, qui ajoute « que s'il n'y a pas de pornographie sur le sujet, il va bientôt y en avoir », toutes les portes s'ouvrent. Internet a révolutionné le monde du porno, l'a démocratisé, l'a offert à la face du monde. de petites industries artisanales de la pornographie ont plongé dans cette règle et ont développé une pornographie sans limite d'imagination, parodiant sans complexe presque tout ce qui existe. Une fois encore, devant le succès de l'originalité, la grosse industrie friquée vole le concept, ce l'approprie, mettant gravement l'art et la créativité de ces petites structures sur la voie de l'extinction. Décidément, le dieu pognon fout toujours tout en l'air. Cette nouvelle voie en ouvre une autre, le sexe avec des extraterrestres, avec des témoignages de personnes qui délirent. Le livre replonge à ce moment là dans une nouvelle platitude. L'encéphalogramme reste plat le chapitre suivant, celui sur les poupées sexuelles et éventuellement le futur des « Sexedroïdes ». Je trouve que ce chapitre aurait pu être intégré dans le chapitre des jouets sexuels, les godemichés. Ensuite, passant d'une poupée inerte qu'il faut lubrifier avant emploi, l'auteur change radicalement de direction pour aborder le sujet des femmes fontaines. Encore une fois, il explore la toile à la recherche de ce phénomène, souvent filmé mais rarement vécu par la plupart d'entre nous. Est-ce un manque de savoir faire de notre part, est-ce les barrières physiologiques du monde judéo-chrétien qui empêche ce miracle de l'orgasme ultime et paroxysmal ou paroxystique, ou bien encore paroxysmique. Je ne sais pas quel adjectif choisir. Mais pour avoir la chance d'avoir connu quelques expériences (sans me vanter), avec des femmes fontaines, où je n'ai jamais compris comment c'est arrivé, je sélectionnerais plutôt paroxysmique car le plus impressionnant n'a pas été l'éjaculation féminine mais la puissance sismique, épileptique de l'orgasme. Le chapitre suivant, je l'avoue, je l'ai quelque peu zappé. Il est consacré à l'autofellation. L'auteur, ensuite, nous gratifie d'un rêve journalistique qu'il a depuis le début de sa carrière, les confessions d'un anus d'actrice porno. Pourquoi pas, mais je n'y vois rien d'existentielle. C'est juste drôle si on le prend au second degré. Par l'intermédiaire de sa propriétaire, l'anus, qui semble être l'outil sexuel préféré de sa légitime, nous dresse un portrait du monde de la production du cinéma pornographique. Il nous en révèle quelques vérités. Notamment, qu'en France, le statut de star du porno est éphémère. Il est difficile de trouver des rôles quand les producteurs cherchent des nouvelles, qui font comme une fusée d'artifice, explosent une fois puis sont inutilisables. L'anus de la star explique qu'on appelle ces filles des « Yaourts » car à peine ouvertes, elles sont périmées. On apprend que ce milieu ne fait pas de sentiment et que la plupart des femmes ne sont que des outils, des objets, des pompes non seulement à sperme mais à fric. Le milieu ne doit pas faire trop rêver, plus de filles passent vite à la trappe plutôt que de briller au firmament des célébrités. L'organe précieux explique que c'est plus confortable de travailler dans d'autres pays, comme la Hongrie ou les Etats-Unis. Il explique que sa patronne le préfère au vagin, qu'il apporte plus de plaisir mais surtout qu'il est plus endurant que sont fragile voisin qui ne supporterait pas l'intensité des rapports demandés pour que l'actrice fasse son métier au quotidien.

Pour conclure, en épilogue, l'auteur nous explique que ce livre est satanique. Il suffit d'aborder, de pratiquer ou de consommer de la pornographie pour que l'on offre son âme au diable. Les catholiques extrémistes de France et d'ailleurs vous le diront et seront prêts à vous lapider pour cet outrage à dieu, à leur dieu, ce grand et éternel castrateur créé par l'homme pour asservir l'homme et surtout museler les femmes, ces diablesses tentatrices et perverses, créées pour servir et satisfaire les mâles de notre espèce. La pornographie serait un complot judéo-maçonnique. Les Francs-Maçons promeuvent la pornographie, téléguidés par des arrières-loges sataniques dans le but de pervertir la société traditionnelle et de la guider sur l'autoroute des enfers. Pourquoi pas ? C'est le chapitre le plus intéressant du livre, le plus élevé spirituellement. Mais, au final, le livre qui touche un sujet social tel et de plus en plus important reste léger, parfois sur le simple ton de la grivoiserie. Je reste toujours sans réponse. La pornographie peut-elle être élevée au rang de l'art ? Quand on regarde la « Naissance du Monde » de Gustave Courbet, on pourrait l'affirmer mais quand il faut la défendre pour l'exposer dans un musée national face aux levées de scandale des puissantes organisations chrétiennes et autres, on tente d'expliquer au grand public que c'est une oeuvre d'art et pas une oeuvre pornographique. Le traité ne parle pas non plus de l'exploitation des êtres humains dans ce milieu qui, pour beaucoup de jeunes femmes, est plutôt un enfer que le nirvâna. Le style est limpide, parfois populaire mais toujours plaisant. Ca ce lit assez vite puisque, hormis le premier chapitre, je l'ai lu d'une traite hier soir pour rester dans les clous de mon « contrat » masse critique et respecter le délai des trente jours. La présentation du livre, avec sa couverture souple, est agréable et offre une bonne prise en main. Sur le sujet, le sexe et nous, peu d'ouvrages sont consacrés exclusivement au porno, celui-ci aurait pu pousser le bouchon un peu plus loin, aborder d'autres média que le cinéma, comme la littérature, la bande dessinée, les hentaï, la peinture, la danse, …

Bon, contrat respecté. Si vous trouvez cette critique un peu longue, c'est que je me fais un devoir de rendre honneur à l'opération masse critique qui mérite, si elle nous offre des ouvrages pour que nous les critiquions, qu'on se gratte un peu pour elle. Il est vrai qu'on tire un peu au hasard pour choisir des livres qui nous sont inconnus et que le livre dont nous héritons n'est pas toujours le choix idéal ou parfois surprenant. Je ne démolirai pas ce livre qui reste un bon moment de lecture, qui apporte quelques découvertes intéressantes mais qui ne restera pas dans les anales des nombreux essais écrits sur le sexe. J'avoue préférer l'érotisme à la pornographie mais je n'ai jamais su ériger une frontière entre les deux. Encore merci pour l'envoi de ce livre.
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