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Critique de StCyr


StCyr
01 décembre 2021
Soixante-neuf tiroirs - comme les soixante-neuf-tiroirs de bois d'essences différentes d'un meuble étrange décrit dans le roman et dont le soixante-dixième espace donne sur l'immensité, comme les soixante-neuf chapitres du livre. Les protagonistes et les évènements gravitent autour de la figure fort originale d'Anastase Branitza et de son non moins singulier et unique roman, Fondation. Cette oeuvre est la refonte de lettres qu'il a adressé à une jeune française vivant en Serbie et qu'il n'a jamais vraiment rencontré, avec qui il est rentré en contact par le plus étrange des biais, la lecture simultanée d'un même ouvrage. Bien curieux roman en vérité que ce Fondation, à telle enseigne qu'il a été éreinté par les rares publications qui en ont fait la recension, aggravant le désespoir irrémédiable de Branitza suite à la fin de son idylle fantasmée. Un récit sans histoire ni personnage, où les seuls événements sont la course du soleil, le ballet des oiseaux et la pousse des végétaux, rien qu'une longue description de la villa qu'il a imaginé comme écrin de son fol amour, de son architecture extérieure et intérieure, de son ameublement, des objets qu'il renferment, du cadre qui l'entoure - jardin à la française et rivière, l'ensemble environné d'un bois, le tout décliné avec un luxe de détail qu'on ne rencontre que c'est le maniaque jouet de sa monomanie.

Ce remarquable roman est basé sur l'idée poético-fantastique de départ, que les gens peuvent se rencontrer, communiquer et interagir entre-deux, par le biais de la lecture concomitante du même ouvrage, sans égard des distances. C'est ainsi une ode ludique et ingénieuse à ce vice impuni, selon Valéry Larbaud, pourtant fort sévèrement châtié en l'occurrence dans le présent roman, et qui nous réunit tous ici : la lecture. L'auteur illustre magistralement la vie parallèle parfois (souvent?) plus riche et gratifiante qu'expérimente le lecteur à travers cet acte qui a le pouvoir de contracter ou de dilater le temps à sa guise, dont la relativité n'est jamais mieux ressentie que dans cette activité sans égal. Pas de côté vivement recommandé dans le sentier trop peu fréquenté de la littérature balkanique.
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