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Critique de patricelucquiaud


Ce roman fait partie de lectures "croisées"...
« Lectures en alternance » serait sans doute plus approprié du fait qu'il s'agit de la lecture de deux oeuvres différentes lues, l'une un soir, l'autre, le soir suivant, et ainsi de suite... mais j'ai préféré ainsi titrer cet article car ces lectures se croisent effectivement, me trouvant, moi, le lecteur, à la jonction...

Oh, cela n'a rien d'extraordinaire, je n'invente rien sur cette façon de lire deux romans à la fois et je me doute que d'autres font certainement plus avec encore plus d'ouvrages… Ce n'est non plus un quelconque défi, c'est tout simplement faire se rencontrer des personnages d'époques très distantes l'une de l'autre, dans ma conscience et mon imagination de lecteur. Ce qui est sûr, c'est que j'ai été très assidu dans cette manière de procéder et que j'étais passionné par ces intrigues différentes mais aussi par une galerie de personnages de premier, mais aussi de second plan, qui ont marqué L Histoire, voire la Légende...

Il s'agit de « Jeanne d'Arc » de Edward Lucie-Smith et de « Les portes de Gergovie » de Michel Peyramaure. Deux oeuvres associant la fiction à réalité historique de deux événements marquant de notre Histoire, moments distant de presque 1500 ans dans le temps. le premier salvateur, le second fondateur de notre nation au coeur des tourmentes guerrières.

Des conquêtes de César proconsul romain en Gaule celte, au premier siècle avant Jésus Christ, aux batailles que livra la Pucelle pour bouter les Anglais hors de France au premier tiers du XVe siècle.

Le nombre de pages des deux livres étant sensiblement différent, j'ai en toute logique, terminé la lecture du premier cité, avant le second...

Dans l'un et l'autre, la chronologie historique est respectée, seul le contexte d'époque diffère et, avec, les mentalités des personnages, les degrés de culture et de civilisation ; par contre, ce qui les distancie c'est leur datation en rapport avec l'avènement du christianisme : avant – après …

Le premier met en évidence le personnage de Jeanne d'Arc auréolé par sa céleste mission qu'on voudrait dégager de sa gangue mystérieuse pour la rendre plus conforme à la vérité historique (L'auteur est Anglais...)

Le second, met en filigrane le personnage de César intraitable conquérant pour mettre en avant un héros imaginaire : Kouros jeune Grec recueilli par les Arvernes de Gergovie.

Dans « Jeanne d'Arc » le personnage historique rayonne par l'impact de la légende sur le fait historique ;

Dans « les portes de Gergovie » Kouros, personnage imaginaire, devient le faire-valoir de cette autre réalité historique...

C'est bien cette polarité qui est haletante !...




Le livre : « Portes de Gergovie » de Michel Peyramaure.

Environ 1500 ans plus tôt, le sol pas encore français, est aussi soumis à l'envahisseur. Ce vaste territoire constitué d'un maillage complexe de petits royaumes manque d'identité unitaire ; ceci profite au conquérant romain qui, au gré de ses avancées, établit des alliances avec certains chefs de tribu opportunistes tout en faisant la guerre à d'autres bien plus belliqueux et surtout soucieux de garder leur indépendance et liberté de circuler dans cette Gaule que César veut soumettre.

Michel Peyramaure nous introduit avec justesse et brio dans cette époque lointaine, nous faisant vivre, grâce à l'intensité du récit, cet épisode historique fort qui scellera le destin de notre nation.

Nous entrons alternativement dans l'écriture, livre après livre, de la conquête des Gaules de César que son aide de camp et scribe Hirtius l'aide et conseille à rédiger, et dans la cité Arverne de Gergovie où Kouros le Grec, capturé par les hommes du roi Gobanito, sera « esclave libre » en la cité. Hébergé chez le druide Uritaco, Kouros jouira de l'estime réciproque que se vouent ces deux hommes puis s'attachera de plus en plus au mode de vie de ces gaulois qui ont pactisé avec César mais vivent toujours à leur manière celte, découvrant les rites parfois barbares de leur religion mais aussi toutes les techniques et pratiques avancées pour l'époque, en agriculture et en artisanat.

C'est une plongée saisissante dans trois courants de culture très différente mais aussi complémentaire que Michel Peyramaure nous fait exécuter : Grec – Latine – Celte. Lyrisme épique, Puissance militaire, Autarcie tribale, se rencontrent et se confrontent parfois jusqu'à la mort, jusqu'à l'extinction.

Ces personnages regroupant ceux que L Histoire a retenu et ceux habilement créés par l'auteur, se retrouvent dans la tourmente de ces temps de conquête, de batailles et de longs sièges, mais aussi les passions qui les animent et les font grandir jusque dans la légende. de Vercingétorix et César, héros antagonistes de cette épopée, nous partageons les affects, les aspirations, les stratégies combatives mais aussi leurs tourments et leur doutes. Kouros, épicurien, aède philosophe, témoin bien présent dans cette confrontation haletante, d'abord loin des vicissitudes et menées guerrières sera, lui aussi, entraîné dans la furie des combats. Son inspiration et son sens de la stratégie en fera un héros malgré lui. Les femmes, dans leur environnement se manifestent comme de belles et pugnaces égéries, tantôt amazones fulgurantes, tantôt mères dévouées à leurs progénitures...

De Gergovie la victorieuse à l'oppidum d'Alésia la vaincue, la tragédie prend de l'ampleur et l'occupant grandit en maître aussi intraitable qu'incontestable de ces territoires arrachés à leurs volontés d'indépendance. Libre, redeviendra la Gaule romaine qui, dans l'épilogue, a rassemblé Hirtius et Kouros… nous les retrouvons page 400, dernière de ce récit :

« Ces gens – elle (Samara compagne de Vercingétorix) et Kouros – sont fermés sur leurs secrets ; le monde où ils vivent est en dehors du monde, sous les épaisseurs de nuit et de glace ; ils ont la fierté des vaincus qui repoussent les grâces du vainqueur. Leur victoire, c'est cette intransigeance, ce refus, ce secret.

Je dois partir, dit Hirtius . Puis-je dire à César que je t'ai rencontré ?

César ? Dit-il. Se souvient-il seulement de moi ? »



Ainsi, au cours de ces soirées de décembre, ai-je vibré avec ces personnages historiques et fictifs, vivant avec eux ce qui n'est pas le commun des mortels, un chemin tantôt mené comme une ascension grandiose, tantôt suivi âprement comme une descente aux abîmes. Chacun a assumé ses choix, chacun a exorcisé ses doutes, chacun a sublimé ses peurs, chacun a suivi ses convictions, confiant en son étoile, en ses voix...

Ils sont un peu nous et, avec eux, nous sommes un peu de cette France qu'ils ont faite de longue date et qui nous a faits, et, qu'immanquablement, nous aimons.
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