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Critique de SophieLesBasBleus


D'où vient l'amitié ? Qu'est-ce qui fait naître ce sentiment indescriptible de proximité évidente entre deux êtres différents mais si complémentaires que la disparition de l'un laisse l'autre irrémédiablement mutilé ? Ce fil d'interrogations constitue l'une des entrées de ce roman absolument bouleversant par les richesses de la matière humaine, sociale, historique, politique et littéraire qu'il développe.
Cette amitié en coup de foudre, Caroline Laurent la ressent, l'explore et en témoigne de la plus belle manière qui soit par des remarques qui se coulent naturellement dans le cours du récit. Elle remonte le temps de la rencontre avec Evelyne Pisier, de leurs premières discussions, de leur travail autour du manuscrit du roman qui nous est donné à lire et de sa crainte de n'être pas à la hauteur de la confiance léguée. le ton est confidentiel, comme un monologue intérieur qui arpente le territoire des doutes et des évidences, mais il tend à l'universel en ce qu'il propose aussi une réflexion sur le travail d'écriture et le cheminement de la création. Jamais cette implication dans la biographie romancée d'Evelyne Pisier ne m'est apparue artificielle ou superflue. Elle donne au contraire une profondeur de champ extraordinaire à l'histoire de Mona et Lucie.
Par Mona et son émancipation, on saisit les enjeux de la décolonisation comme le miroir du combat mené par les femmes après la guerre. Et c'est faire oeuvre essentielle que de rappeler aujourd'hui ces luttes individuelles et collectives pour que des droits soient reconnus aux femmes. Avec Lucie/Evelyne, sa fille, on traverse les soubresauts de la fin du XXème siècle. Les personnages réels et fictionnels incarnent cette dimension historique sans pour autant être traités comme des archétypes ou des emblèmes. Leur côté charnel, humain et faillible nous les rend proches. D'une finesse stupéfiante, le tissage de la fiction et du réel n'est jamais gratuit mais donne une puissance décuplée à la narration.
Me faut-il continuer ? Il y a matière à poursuivre encore la recension des qualités de ce livre qui m'a intégralement extasiée ! J'y ai trouvé tellement d'intelligence, de sensibilité, d'amour, de vie vivante que j'en suis encore estourbie. Quelle que soit la facette que l'on choisisse d'explorer, il garde la limpidité et l'éclat d'un pur diamant et m'a offert un bouquet d'émotions rares.
Et tout au long de ma lecture, apparaissait en filigrane du personnage de Mona, celui de Régina sortant d'une salle de cinéma dans le film de Téchiné. Son rire éclatant de désinvolture insolente n'a cessé de retentir comme la bande-son inséparable de ce roman hanté par l'absence.
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