AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de fanfanouche24


Un volume de souvenirs d'une artiste, Valentine Prax sur un autre artiste, qui fut son mari et compagnon, Ossip zadkine... le ton plein de pudeur de cette vie de couple de créateurs a retenu mon attention envers cette femme peintre, au parcours fort original.

Elle parle de son cheminement, de l'évolution de son style… mais avant tout, elle met en avant l'oeuvre de Zadkine, de ses activités de professeur, de sculpteur…d'homme...
Des chagrins intenses sont effleurés… comme les quatre années d'exil de Zadkine en Amérique, où le couple se retrouve séparé…des malveillances des habitants du village des Arques, qu'ils avaient adopté, et où Valentine Prax se retrouve seule pendant la guerre. Elle a toujours l'élégance de ne pas s'appesantir sur les épreuves intimes, personnelles…et relate avec beaucoup de modestie sa vie avec Zadkine, en sachant que c'est ce dernier qui l'avait encouragée à le faire, alors qu'elle lui exprimait son vif intérêt à la lecture de ses Mémoires à lui, « le maillet et le ciseau » (Albin Michel, 1968)

J'ai choisi deux longues citations qui donnent une assez juste idée de ce petit ouvrage, d'une intense matière humaine et artistique. La première est un encouragement de Zadkine envers Valentine, aux débuts de leur rencontre, pour faire évoluer sa démarche de peintre…La seconde est un descriptif de Valentine concernant l'élaboration des réalisations du sculpteur, autour de van Gogh, que Zadkine admirait au plus point… Ce dernier choix, est très personnel et subjectif, marque une préférence très forte pour la représentation de van Gogh, par cet artiste, que je trouve d'une expressivité bouleversante…


« Zadkine avait remarqué que j'étais timide, craintive, en ce sens que je n'osais pas, en peignant, m'éloigner trop de mon modèle. Il me dit : « En art, tout est permis. Il faut donner libre cours à son imagination. » Ces paroles furent pour moi la bouffée d'air frais que le prisonnier doit recevoir en plein visage quand on le libère. Cela me parut merveilleux. J'avais entendu, durant toute mon enfance, et lu sous chacune de mes narrations en classe : « Prenez garde à votre imagination. Jugulez-la. » - Et voilà qu'un artiste me dit « n'ayez pas peur de votre imagination ». Ce fut pour moi la parole magique. (p.33)

J'en viens à la période de Zadkine qui fut tournée vers Van Gogh
«- le travail sur Van Gogh, qui devait aboutir à la statue finalement érigée à Auvers-sur-Oise où mourut le peintre génial, fut toute une période importante dans la vie de Zadkine. Aidé, comme je l'ai dit par M. Trabaut qui collectionnait tous les documents se rapportant à Van Gogh, Zadkine lut énormément. Quand il lut les admirables lettres de van Gogh à son frère Théo, il sut me faire partager sa passion et sa ferveur. Au fur et à mesure qu'il lisait, qu'il étudiait la suite de portraits et autoportraits, au fur et à mesure qu'il comprenait et entrait dans la vie de son héros, Zadkine découvrait en lui-même des richesses et des élans. Quand il se mit à sculpter, ce fut fécond : il modela un –Van Gogh prédicateur-, puis un –Van Gogh assis et dessinant-, puis un –Van Gogh à travers champs-, puis un –Van Gogh debout, prêt au travail-..Pendant des mois, Zadkine pensa et vécut avec Van Gogh…(p.124)

Ce récit est magnifique… il est à la fois un bel hommage à Zadkine et la continuation d'un partage au-delà de l'absence de celui ,parti en premier, Zadkine. de plus, ce qui ne gâte rien, ce texte publié par la Bibliothèque des Arts (Collection Pergamine) est un bel objet, enrichie des dessins de Zadkine et Valentine… Pour tous les passionnés d'art…une lecture prenante et riche de mille détails sur la sculpture, les matières, la nature, les rapports de Zadkine avec ses élèves, ses amis…et sa compagne, etc.

Commenter  J’apprécie          163



Ont apprécié cette critique (15)voir plus




{* *}