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Critique de DameOdessa


Âmes sensibles s'abstenir et roman assurément à ne pas lire une nuit d'orage (ce que j'ai fait, c'est très drôle de découvrir la dernière partie de l'ouvrage avec l'ambiance adéquate)!
Été oblige, les centres commerciaux nous font la promo "deux livres de poches achetés = un offert". C'est comme cela que j'ai découvert "Relic". Je l'ai pris sans grande conviction, juste par curiosité, pensant passer quelques heures avec un roman sympathique...
Je n'ai jamais été aussi loin de la vérité!
Inutile de cacher que j'ai été littéralement happée dès les premières lignes, le style des auteurs est fluide, captivant, incroyablement vivant, leur plume est un piège dans lequel on tombe avec délice... et dont on ne sort pas indemne.
Preston et Child savent distiller une ambiance terriblement malsaine dès le premier chapitre de l'ouvrage; leur manière de décrire les lieux que nous sommes amenés à traverser est tellement précise et imagée que l'on finit par ressentir la moiteur étouffante de la jungle, voir les ombres se mouvoir dans les couloirs du musée, entendre les plus infimes bruits qui l'animent jusqu'à ressentir cette odeur pestilentielle qui annonce qu'il est déjà trop tard. C'est peut-être ce que j'ai le plus apprécié avec ce roman; l'atmosphère devient un personnage à part entière, sur laquelle repose le plaisir de la lecture.
Mais non contents de nous plonger dans une ambiance délétère que l'on prend plaisir à subir en frissonnant, les auteurs nous offrent une galerie de personnages qui ont tous un petit quelque chose qui les rend uniques, attachants (tellement attachants que celui qui avait mes faveurs connait un sort funeste et que un pour lequel j'éprouvais une certaine affection m'a littéralement donné envie de l'écharper à la fin du roman...). En sus, ils se complètent tous parfaitement, ils sont équilibrés, aucun ne prend le pas sur l'autre (même Pendergast d'un charisme éblouissant, cultivé, intuitif, sarcastique est justement "dosé" dans ses apparitions et interventions pour ne pas phagocyter le reste du casting). Ce qui m'a réellement plu, c'est que chaque personnage apporte sa pierre à l'édifice de l'intrigue et de l'enquête, chacun en fonction de sa discipline phare, de son regard sur la situation, de son courage même et dans les moments de crise, certains se révèlent et nous étonnent, tout en restant humains, faillibles. Margo est une héroïne que l'on prend plaisir à suivre entre une vie de famille compliquée, un mémoire chronophage et source de stress et bien entendu une aventure qui la dépasse et dans laquelle elle s'investit pourtant au péril de sa vie. le Professeur Frock, tout en représentant en un sens, le mentor, le guide, n'est pas un personnage qui écrase les autres de sa science, il est ouvert à toutes les hypothèses, accepte le dialogue. le fait qu'il soit coincé dans un fauteuil roulant donne une dimension assez peu commune au personnage, je ne saurait l'expliquer mais ce handicap est à l'origine de certains éclats de courage dans des situations pourtant dramatiques. Smithback le journaliste est à la fois horripilant dans son mélange d'arrogance et de désinvolture et pourtant un des ressorts "comiques" qui permet de dénouer plus d'une fois la tension et un personnage prêt à consentir de gros sacrifices, officiellement pour servir sa cause, en réalité plus par altruisme que par intérêt. D'Agosta, tout en restant l'archétype du lieutenant de police new-yorkais, à ce côté terre-à-terre, pragmatique qui permet encore plus d'ancrer la situation dans le réel. C'est un personnage d'équilibre, non dénué d'humour (ses échanges avec Pendergast sont savoureux) mais qui garde la tête froide, donc rassurant. Quant à Pendergast, c'est un personnage atypique; on sort du cliché de l'agent du FBI bas de front, obtus (Coffey se charge du rôle) et ce qui frappe immédiatement c'est sa grande érudition qui lui donne un charme particulier, en sus des zones d'ombres qui parfois lui donnent un côté inquiétan.. Ca et son ouverture d'esprit...
C'est justement ce point qui m'a énormément séduite dans ce roman.
Généralement dans ce genre d'ouvrage où les héros se retrouvent confrontés à une situation "paranormale" on a toujours droit à un personnage qui y croit dur comme fer et se heurte à tous les autres qui le prennent pour un doux illuminé jusqu'à ce que la vérité leur saute au visage. Et bien là non ! Les personnages ne sont pas tous d'indécrottables sceptiques cartésiens, ils ont plus ou moins réticence vis-à-vis d'explications surnaturelles mais ils admettent tous la probabilité que quelque chose ne soit pas « normale » dans ce qui se trame dans le musée. Dit comme ça ça peut paraitre n'être qu'un détail mais pour le lecteur c'est réellement rafraichissant !
De ce fait, l'intrigue se met très rapidement en place, on ne passe pas els dix premiers chapitres à tourner autour du pot. Pour autant, les auteurs ne négligent pas els retournements de situations. Qui là encore sont un véritable régal ! Non seulement ils sont admirablement plausibles mais en plus ils n'ont rien du prétexte scénaristiques et la révélation finale fait réellement froid dans le dos et laisse un horrible sentiment de malaise, alors que généralement dans ce type de roman on s'attend à ce qu'enfin la situation se tasse et qu'on soit tranquille.
Ce qui permet à « Relic » d'osciller entre différents genres littéraires, depuis le thriller médical, jusqu'au fantastique en passant par l'histoire d'épouvante, tout en gardant une cohésion, une cohérence bienvenues où se mêlent passé et futur, rites primitifs et génétique.
Mais « Relic » est aussi une critique acerbe du pouvoir de l'argent, de ces personnes qui ferment les yeux sur l'horreur (ou pire, l'exploitent sans vergogne) au détriment du bon sens et donc de la sécurité. Wright, Rickmann et Cuthbert en sont la représentation parfaite et l'on peut y ajouter Coffey, servile, flagorneur qui ne cherche qu'à brosser els autorités dans le sens du poil (à ce propos, le Maire de New York pour une fois sorts des sentiers battus et la manière dont il remet en place Coffey est un délice !). Je pense aussi que ce roman peut-être vu comme une critique d'une forme d'« obscurantisme éclairé » : dans un monde où la science explique tout, il y a pourtant des éléments anciens, primitifs, dont elle se rit, auxquels elle ne prête pas assez attention. Si le fantastique est finalement démonté par la rigueur scientifique, il n'en demeure pas moins qu'il était une mise en garde évidente. Quand au twist final qui amorce la suite (que je suis très pressée de lire !) il va sans dire qu'il donne une fois de plus une très mauvaise image de la religion scientifique et de ses rituels qui échappent à tout contrôle. Il y beaucoup de pistes de réflexions intéressantes dans « Relic », depuis le fait que si nous sommes choqués par les profanations de nos cimetières, nous n'avons aucun scrupule à piller ceux des civilisations antérieures jusqu'à la régulation naturelle des espèces, l'apparition de super-prédateurs et le fait que l'humanité n'est pas à l'abri d'une telle menace. En bref, l'ouvrage, tout en étant du divertissement, n'oublie pas de faire réfléchir sur certains points et peut-être le malaise vient-il surtout de cette sensation que nous ne sommes pas loin de voir survenir chez nous un jour ce qui se déroule dans le roman…
Pour conclure, je dirais que « Relic » a été une des meilleures surprises littéraires que j'ai pu expérimenter ces derniers mois ; rythme trépidant, galerie de personnages intéressants, intrigue à tiroir aux multiples rebondissements et écriture splendide. Je recommande vivement cet ouvrage à tous els amateurs d'épouvante, d'enquêtes, d'ambiances malsaines qui vous retournent els tripes et de fanatiques d'occultisme !
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