Le quotidien de Kathryn Brooker consiste à subir les railleries des élèves, effectuer les tâches ménagères selon le calendrier fixé par son époux, dans la peur de ses sanctions et de sa violence, tout en s'efforçant de faire bonne figure devant ses enfants Lydia et Dominic. Jusqu'au jour où Kathryn Brooker tue son mari.
Le roman alterne ensuite les chapitres dans le passé avec l'épouse - Kathryn, et dans le présent avec la veuve – Kate.
Kathryn
Les chapitres dont Kathryn est la protagoniste montrent un quotidien de femme soumise aux exigences insolites et capricieuses de son mari – Marc ; coupée de tout lien social ; fréquemment humiliée ; et gardant le secret sur les violences physiques et sexuelles subies la nuit selon un système pervers « de sanctions » édicté par Marc.
Si certains ressorts du pervers narcissique sont là, le lien d'emprise n'est pas exploité, et cela nuit à la crédibilité du récit.
Kathryn subit ce quotidien, tout en essayant de préserver ses enfants de leur père. Elle garde ses plaies cachées, et prétend que tout va bien.
Cet état d'esprit est linéaire, il ne connaît pas de variation : jamais elle ne craque et souhaite impulsivement s'enfuir ; jamais elle n'est submergée de colère et envisage de se venger ; jamais elle ne retombe dans ses bras par effet de manipulation.
Kathryn apparaît comme la mère prête à tous les sacrifices pour ses enfants, qui encaisse encore et encore. La seule fois où elle flanche, elle tue son mari.
Kate
Après le meurtre de son mari, Kate est condamnée à 15 ans d'emprisonnement. Là encore, je ne trouve pas cette peine très crédible – en tout cas si cela avait lieu en France (n'étant pas spécialiste du système pénal anglais).
Une fois sortie de prison, Kate espérait pouvoir revoir ses enfants, qui n'ont pas daigné la visiter pendant ces 15 années. Elle réalise enfin que ces derniers ne sont pas prêts à revoir l'assassin de leur père.
Pour autant, et après toutes ces années de violences, puis de prison, sans autre soutien que sa meilleure amie Natacha, Kate rebondit. Elle s'installe sur une île au décor idyllique ; rencontre Simon, un homme de foi qui l'accueille à bras ouvert ; puis fonde sur cette île un foyer d'accueil pour femmes fuyant la violence.
Bref, si les chapitres concernant Kathryn manquaient de profondeur, ceux concernant Kate sont un déferlement d'évènements improbables digne d'une comédie romantique – tout sourit à Kate, tout est étrangement facile – la seule ombre au tableau étant le silence de Lydia et Dominic.
Kate (comme Kathryn) est idéalisée en tant que « femme forte » - mais sans que les souffrances subies ne soient proportionnées aux épreuves traversées – entachant ainsi la crédibilité du roman. Cette partie devait concerner la résilience, la difficulté de surmonter les chocs post traumatiques, et la peur d'affronter l'après, la quête de sens, la quête de soi. Or, Kate ne rencontre pas de difficulté, elle avance sans obstacle. le récit manque, là encore de nuance.
Par ailleurs, si Kate souffre parfois de chocs post traumatiques, ceux-ci apparaissent dans le récit de manière très à propos dans l'intrigue, « comme par hasard ».
Je n'ai pas plus été convaincue concernant la forme, le style d'écriture étant simple, mais contenant des redondances (« elle se mordit la lèvre »…).
En conclusion, le roman manque de crédibilité, en raison de son manque de nuance. Il tend à faire de sa protagoniste une héroïne de tous les instants, ce qui est incompatible les épreuves et souffrances voulues par l'intrigue. le ton oscille entre empathie (Kathryn) et mièvrerie (épanchement sans fin sur le manque de ses enfants) ; et les évènements (surtout dans les chapitres concernant Kate) s'enchaînent de manière un peu trop facile, avec des timings « juste à temps comme par hasard ».
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