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Critique de Chouchane


Une plongée hypnotique au coeur des entrailles d'un Marseille pourri. Je dirais, moi qui suis marseillaise des quartiers nord, marseillais à l'âme sensible s'abstenir. L'enquête de Pujol qui a duré 10 ans est un monument du genre, elle offre un portrait complet et compréhensible d'un système nauséabond. J'en sors lessivée, déprimée mais avec le minuscule espoir que ce livre fera peut-être bouger les lignes.
Ça démarre très fort dans les cités du nord peuplées de mains noires - ces minots sans cervelle (au sens propre) qui coupent le shit avec de l'huile de vidange et du valium pour vaches et… le fument – de dealers, de gros voyous, d'ados tueurs, d'ados tués, de mères éplorées, de pères déboussolés. Pour beaucoup de jeunes la meilleure perspective c'est les Baumettes (la prison de Marseille), la pire le cimetière. Dans tous les cas, illettrés ou analphabètes, un véritable échec de l'école de la République.
Quand on termine de cette première partie on pense avoir fait le plus gros. Que Nenni ! le meilleur est toujours pour la fin. On rentre dans la partie la plus noire de l'affaire, le politique. Un voyou c'est un voyou, on sait tous ce que c'est ! Mais un politique-racaille c'est plus compliqué à comprendre. A Marseille, droite et gauche ne veulent définitivement, résolument, absolument rien dire ! Et Pujol fait le constat que les marseillais dégoutés et devenus politiquement apathiques votent de moins en moins et ça fait l'affaire des mêmes : les politiques qui arrosent de subvention leurs protégés (associations de foot, écoles privées, fondations diverses…) qui eux vont voter pour leur protecteur. La boucle est bouclée, on fait sa soupe entre amis, on se protège, on s'achète à coup de subventions et on augmente les impôts locaux ! Sans oublier les entreprises du BTP qui se servent sur la bête à coup de travaux plus ou moins foireux qu'il faut refaire chaque année « Marseille est un gruyère » dit Pujol tant il y a des chantiers partout. Sans oublier les relations entre anciens tolards devenus patrons de très chic restaurants et toujours en excellentes relations avec la pègre et la politique. Sans oublier les affaires qui minent la politique dont les plus emblématiques concernent Sylvie Andrieux (PS ) mais « nièce spirituelle » de Gaudin (UMP), Jean Noël Guérini exclu du PS pour détournement de fonds publics et soutenu aux élections municipales par la droite .Sans oublier les liens familiaux comme ceux, par exemple, entre Samia Ghali (PS) et Nora Préziosi (UMP) laquelle a perdu deux neveux dans des règlements de compte. Sur le trône de ce royaume, le maire Jean-Claude Gaudin dont l'entrisme et l'expérience politique autorisent toutes les dérives pour se maintenir au pouvoir. Au fond, le ciel n'est pas si bleu que ça à Marseille. le meilleur Pujol nous le réserve dans les derniers chapitres, ceux consacrés au FN et là on croit être revenu au temps de Rivarol, l'extrême-droite marseillaise s'enracine dans des partis fascistes et dans l'OAS (organisation armée secrète pour l'Algérie Française). Même Guy Tessier placé par Gaudin à la tête de la communauté urbaine est issu d'un mouvement néofasciste à croix celtique le Parti des Forces Nouvelles scission d'Ordre Nouveau. Bref, ce que nous disent ces 315 pages c'est que Marseille est dévorée par la corruption, un communautarisme entretenu et... ce n'est pas demain que ça va changer. Il parait que vivre libre, il faut vivre les yeux ouverts, voilà les miens le sont !
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