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Critique de Bequelune


Hugues de Queyssac nous entraine au milieu du 14e siècle en Aquitaine, là où débuta cette guerre qui devait durer plus de cent ans. La vie y est rude mais les occasions d'en profiter demeurent nombreuses. Les personnages ne s'en privent d'ailleurs pas. Amateurs de vins et de bonne chère (voire, pour certains, de bonnes chairs), Queyssac nous décrit des personnages sensuels. Brachet de Born, écuyer d'un droit seigneur du Périgord, se retrouve entraîné à ses dépends dans une suite de péripéties. On l'accuse d'abord d'un crime horrible, avant de l'obliger à partir pour l'Orient et ses terres dangereuses pour un Chrétien. En parallèle, il ne cesse de rechercher Ysabeau de Guérande, l'amour de sa vie qui lui reste disparue.

Avant d'en dire davantage, il me faut saluer le fabuleux travail sur le langage réalisé par Hugues de Queyssac. Toute l'originalité de ce livre, son charme aussi, vient du fait que l'auteur a su suffisamment s'imprégner de vieux termes, d'anciennes tournures de phrases héritées du vieux-français, pour arriver à en faire un usage fluide, léger. C'est ainsi une ambiance toute entière qui est créé par ce langage, ces vieux mots qui croquent sous la langue. Il y a presque de l'exotisme à redécouvrir ainsi sa propre langue natale.
Mais, me direz-vous, l'action du roman se passe en Périgord, terres où l'on ne parlait alors pas à cette époque le vieux français, mais une toute autre langue, la langue d'oc, ou vieil occitan ! Et bien oui, et l'auteur en a tenu compte ! Et c'est là tout le génie de Queyssac d'avoir mélangé à ce français vieilli des termes, mots, expressions, sonorités occitanes. Une sorte d'occitan francisé, des mots qu'on retrouve d'ailleurs parfois encore en usage aujourd'hui, dans les bouches des vieilles gens du Sud-Ouest. Ce mélange, toujours fluide, est presque oeuvre de poésie.
(L'autre bonne idée, c'est d'avoir mis en fin d'ouvrage un lexique qui vient nous éclairer lorsque le sens d'un de ces mots nous est confus. Ce lexique propose en plus quelques renseignements de type encyclopédiques qui raviront les amateurs d'histoire médiévale.)

Là où Hugues de Queyssac est une nouvelle fois fidèle à cet esprit médieval occitan, c'est dans le thème du roman. L'Europe des poètes est née occitane, avec cette dynamique introduite par les "trobadors", troubadours porteurs de mots et d'érotisme. C'est eux qui ont introduit en Occident une nouvelle vision de l'amour, une sorte d'invention de l'amour-passion en somme, mais aussi et pour la première fois une mise en avant de amour hétérosexuel (puisque les récits d'avant les troubadours racontaient davantage les quêtes entre chevaliers que les liaisons hommes-femmes). Bref, ce nouvel amour courtois avait des codes, notamment le fait de chanter les louanges d'une femme inaccessible parce que supérieure (en noblesse, en vertu, etc). Dans La Danse du loup, Queyssac reprend ces codes en faisant partir Brachet de Born à la recherche éperdue d'une belle qu'il n'a vu qu'en songe, et qu'il chante pourtant en vers plus ou moins maladroits. La référence aux troubadours est omniprésente, notamment à travers l'évocation d'un ancêtre de notre écuyer Born, un valeureux guerrier-poète.

Une critique toutefois : à ces vieilles tournures de phrases et cette thématique courtoise, Queyssac a voulu méler quelques codes d'écriture davantage modernes, hérités du thriller. On a donc des chapitres qui finissent par des cliffhangers, fin ouverte pour créer des effets de suspense. J'ai l'impression que l'auteur était bien moins à l'aise avec cette façon de faire. Ce style pas toujours maitrisé paraît parfois artificiel. Comme si Queyssac avait hésité entre l'épopée historique et le thriller, et qu'au final il n'avait pas choisi, mélant les deux dans un mescladis pas toujours adroit.

Enfin bon… Je viens d'acheter le deuxième tome. Preuve s'il en est que cette histoire m'a convaincu !
Lien : http://motsdepasse.org
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