Crise

- Ca s'appelle une croix celtique. Comme l'indique son anneau central.
[...]
- Une des préférées de l'Eglise irlandaise. Elle figurait sur les monuments dès le huitième siècle. Surtout sur les pierres tombales.
- Beuh...
C'était Hi, qui faisait sa recherche sur son iPhone.
- Et maintenant, la croix celtique est un des symboles préférés des groupes blancs racistes. Il a d'ailleurs été interdit en Allemagne.
- Bien joué, les Allemands. Encore un symbole religieux ancien ruiné à jamais. A ranger à côté du svatiska.
C'était Shelton avec son humour à froid.

- Mais écoutez-moi, c’est tout ! ai-je crié.
[...]
Les Alliés n’avaient pas rencontré de résistance plus déterminée en Normandie.
- Je ne veux pas ! a gémi Shelton. Tu vas parler, et on va tous dire oui, et l’instant d’après je vais me retrouver suspendu à la tour Eiffel en pleine nuit, poursuivi par des vampires Ninja. Non et non !

- Les phéromones, ça te dit quelque chose?
- Attends, je tape le mot. Ah, voilà! C'est intéressant. Les phéromones sont les substances chimiques que le corps sécrète pour déclencher une réaction sociale chez les membres de la même espèce.
- Tu peux expliquer?
- Ce sont les odeurs. Elles agissent à l'extérieur de l'individu sécréteur en influant sur le comportement de l'individu récepteur.
Hi s'est tu un instant, puis:
- Des instructions olfactives. Bizarre.
- Et comment cela fonctionne?
- Il y a des phéromones d'alarme, des phéromones sexuelles et quantité d'autres. Les insectes s'en servent.
- Vraiment?
- Voici un exemple.
Hi a cliqué avec sa souris.
- Quand une fourmi détecte de la nourriture, elle sécrète une trace odoriférante qui va permettre à ses petites copines de suivre la piste jusqu'à la source du repas. Certains animaux font pareils en période de reproduction, pour trouver leur partenaire.
- Les humains aussi?
- Pas que l'on sache. A moins qu'on croie à la pub Axe.

_Qu'est-ce que c'était ?
_Chut !
J'essayais de percer l'obscurité. Deux ombres s'étiraient derrière les herbes des dunes. Quatre points couleur ambre sont apparus, plus près cette fois. Ils sont partis de côté, puis ont disparu. J'additionnais deux et deux. Des yeux. En cercle. J'ai voulu mettre les autres en garde, mais un grondement m'a fait taire. D'autres grognements se sont joints au premier, en un choeur étrange et intense. Chance s'est accroupi.
_Je ne sais pas ce que c'est, mais ça n'a pas l'air content.
_J'ai oublié quelque chose, a dit Shelton, ses lunettes brillant au clair de lune. L'année prochaine, la réserve prévoit de réintroduire des loups roux sur Bull Island.
_Apparemment, ils sont en avance sur le calendrier.
Trois silhouettes parcouraient les dunes au galop. Elégantes. Quadrupèdes.
_Là ! a crié Hi. Sur la droite ! Des loups. Des gros.
_A gauche aussi, a ajouté Chance.
Tandis que je contemplais ce spectacle, terrifiée, une forme s'est matérialisée juste devant moi. Mon esprit enregistrait les détails. Tête forte et triangulaire. Pattes massives. Poitrine puissante et musclée. Un loup, mâle, énorme. Je distinguais certaines couleurs à la lueur pâle de la lune. Ventre et pelage brun cannelle, dos et queue anthracite, museau blanc. J'estimais aussi sa longueur : un mètre cinquante. Et son poids : presque quarante kilos. Il m'observait de ses yeux en forme d'amande.

-Mais écoutez-moi, c'est tout ! ai-je crié.
A ma demande, on s'était réunis dans le garage de Shelton. L'atelier de son père était le meilleur endroit pour examiner mes trouvailles.
Les Alliés n'avaient pas rencontré de résistance plus déterminée en Normandie.
-Je ne veux pas ! a gémi Shelton. Tu vas parler, et on va dire oui, et l'instant d'après je vais me retrouver suspendu à la tour Eiffel en pleine nuit, poursuivi par des vampires ninja. Non et non !
Ben lui a mis une calotte.
Il y a un fond de vérité dans ce délire... On a trouvé le coffre, Tory. On est dans l'impasse, a dit Hi.
-Mais réfléchissez ! Pourquoi enterrer un coffre vide, à moins de vouloir envoyer un message à celui qui le trouvera plus tard ?
-Le message a été reçu, a dit Ben en me tendant le majeur. Ha, ha, ha ! Perdu !
-Peut-être, mais le couvercle était intacte : celui qui a enlevé le contenu avait accès à la clé. Je pense qu'Anne Bonny a de nouveau déplacé le trésor et laissé des indices pour qu'on la suive.
-Qui ? a demandé Shelton, sceptique.
-Mary Read.
-Mais elle était MORTE !
-Peut-être qu'Anne Bonny NE LE SAVAIT PAS ! ai-je hurlé à mon tour.
-Ça suffit ! a crié Ben en nous foudroyant du regard. C'est grâce à Tory qu'on a trouvé le coffre. Écoutons ce qu'elle a à dire. On lui doit au moins ça.
Shelton a levé les yeux au ciel, retenant sa langue.
ben a braqué son doigt sur moi.
-Mais pas de promesses, Brennan. Je ne suis pas fou des chasses au dahu, et en plus on a failli se faire tuer. Deux fois.
-Ça commence toujours comme ça, a marmonné Shelton. On est fichus.
-Merci, ai-je dit, la bouche en coeur.
Intérieurement, je souriais comme un chat bien nourri.
Shelton avait raison, bien sûr. Une fois que j'avais capté leur attention, c'était toujours leur curiosité qui l'emportait. C'était ce que j'adorais le plus chez eux.
-Bien. On a deux choses à examiner

Deux piques métalliques avaient jailli du plafond, leur pointes mortelles formant une tenaille monstrueuse. Et quelque chose était pris entre elles. Shelton a hurlé. Ben a poussé un juron. Hi a gerbé sur ses Nike. Le regard rivé sur un cadavre empalé.

Hi est venu à mon secours.
-Allez bon Dieu, on y va ! On va a Dewees et on se balade. On a rien d'autre à faire, et il vaut mieux une promenade en bateau que de rester ici à jouer au pendu. J'en suis à fond.
Ben et Shelton, eux, s'entêtaient.
Hi donna un coup de coude à Shelton.
-Hé, on garde la foi, hein ?
-OK, a soupiré Ben. Pourquoi pas ? Les Viraux partent en mer à la recherche d'Anne Bonny... une dernière fois.
-Je vous l'avais dit, les gars ! s'est lamenté Shelton. Il ne faut pas la laisser parler. Je vais aller chercher mon deltaplane.

Du menton, j'ai désigné le ventre rond de Hi.
-Super abdos, dis donc.
-Ouais, je fais de la gym deux fois par mois. Quoi qu'il arrive. Mais arrête de fantasmer sur moi, ça me gêne.