De nos jours, grâce aux séries télé - dont certaines sont fort mal documentées, c'est le moins qu'on puisse dire - le public considère l'ADN comme l'Excalibur de la justice moyenne. Hollywood a engendré un mythe selon lequel la double hélice permettrait de résoudre tous les mystères, d'ouvrir toutes les portes, de réparer toutes les erreurs. Vous avez un os ? Pas de problème. Extrayez-en une petite molécule. Dans cinq minutes, vous aurez un miracle !
J'ai établi l'inventaire des os en prenant soin de noter à quel côté ils appartenaient, le droit ou le gauche, pendant qu'Emma prenait d'autres photos. Puis elle a quitté la salle en emportant le crâne, la mâchoire et les dents afin de les faire radiographier.
Elle est revenue au moment où je me disais que la victime était sûrement un homme, compte tenu de la taille de ses os et de la grosseur de ses attaches musculaires.
- Prête pour le sexe? lui ai-je lancé.
- Ah, chéri, si tu savais comme j'ai mal à la tête!
Y a pas à dire, elle me plaisait cette nana!
Pendant ce temps-là, les Basses Terres se préparaient à livrer un nouveau secret. Un troisième cadavre allait être découvert au cours des vingt-quatre heures suivantes, et il m'offrirait autre chose que des os desséchés.
Situation que j’abhorre, en ce qui me concerne, car l’argent y est roi. De l’argent gagné par n’importe quel moyen, excepté ceux qui pourraient mener en taule. Et tant pis pour les forêts tropicales, les marécages, le littoral, les dunes ou la culture indigène précoloniale !
Mourir dans l'anonymat équivaut selon moi à subir une ultime insulte dans sa dignité d'être humain. Cela signifie passer l'éternité sous une plaque portant le nom Inconnu. Cela veut dire : être enseveli dans une fosse anonyme sans qu'il soit fait état de votre nom ; sans que ceux qui s'inquiètent de vous ne sachent ce que vous êtes devenu. C'est une offense. Si, pour ma part, je n'ai pas le pouvoir de rendre la vie à une victime, j'ai celui de lui rendre son nom. De donner à ceux qui restent la possibilité, toute relative, de faire leur deuil. En ce sens, j'aide les morts à s'exprimer, à prononcer leur dernier adieu.
Nous, les gens du sud, sommes fiers de nos bonnes manières.