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Critique de Mistigrif


J'ai pris beaucoup de plaisir à lire ce livre, qui prend différentes facettes, dans une langue toujours affûtée et exigeante. Dans certains chapitres, l'auteur déploie une profondeur à partir de détails qui paraissent insignifiants au premier abord. La beauté d'un paysage de montagne dépréciée par la cuve de fuel sur son socle, des poubelles à roulettes, des chaises en plastique moulé… « Est-ce ma faute si je suis plus sensible aux laideur proches qu'aux beautés lointaines ? »
L'art de contenir tout une vie (ou tout un âge, l'enfance, l'adolescence…) dans quelques situations types, des images clés, des répliques définitives… « Les chagrins sont insupportables, on est en enfer. C'est cela l'enfance. L'enfance vraie, pas celle qu'on raconte ».
« Incroyable… On est là, gentille petite fille, à collectionner les images d'animaux sur les plaques de chocolat, à s'attendrir sur le sort des bébés phoques ; à bien tenir ses classeurs d'école, à souligner les titres, à coller des oeillets sur les perforations pour éviter que les pages ne s'arrachent. Et puis subitement, on suce une bite. »
Des inventaires à la précision Houellebecquienne, sans le cynisme, mais avec une ironie très fine, à peine amère… Oui, il y a une profondeur qui vous happe.
Et puis dans d'autres chapitres, on est dans un roman « ordinaire », qui raconte tout simplement une histoire. Mais il y court toujours un humour distancié, une lucidité qui nous place devant les mensonges que nous faisons à nous-mêmes. Par exemple sur le journal intime : « Que fallait-il écrire ? Ce qui était vécu ou ce qui ne l'était pas ? » Dans les passages qui parlent de la dépression que traverse la narratrice (l'auteur masculin fait usage d'un « je » féminin), c'est par des détails infimes que l'on prend conscience de la détresse et du désarroi du personnage. Plus efficace que les tirades lyriques !
La fin du livre nous ramène au début, la boucle est bouclée, l'ironie du sort ramène la narratrice à son point de départ : pareil, et pourtant si différent. Pareille et pourtant si différente. Faut-il revenir sur soi-même pour pouvoir enfin prendre ensuite une autre route ?... Pour vivre debout, faut-il d'abord connaître la chute ?
Un roman aigu, qui pique, qui fait mouche…
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